Quand le travail d’équipe ne paie pas

Le lendemain de l’étape marathon, à Boualazac, le départ est prévu à partir de 9h00 pour une boucle d’à peine 400km. Comme, en plus, le temps est prévu au beau fixe, c’est presque les vacances!

2 collègues « solo » dans l’aire de départ. Eric, un Francilien en KTM 125 et François, un jeune retraité ancien vendeur de camions Scania

Pourtant je suis fébrile ce Mardi matin car je n’ai pas eu le temps de faire le plein d’essence la veille. Il faut donc que je le fasse avant le départ et je ne sait pas exactement ou se trouve la pompe la plus proche, un Super U situé à environ un kilomètre, d’après ce que l’on m’a dit. Cette tâche que je ferais en moins de 10 minutes en toute décontraction en temps normal, devient une incroyable source de stress a tel point que j’en renverse de l’essence sur la moto!

Finalement je serai bien au départ avec même 10 minutes d’avance sur l’horaire qui m’est assigné. Mais encore une fois, je constate que quand on fait la course, et pas du tourisme, chaque détail compte. Il faut de l’ordre et de la méthode pour pouvoir se concentrer uniquement sur le pilotage.

Quelques minutes après le départ de la première liaison, je m’arrête a un carrefour que je ne suis pas sur d’identifier sur le road-book. A peine arrêté, je vois débouler 3 motos qui prennent à droite. Malgré quelques doutes, je les suis tel un mouton de Panurge pour constater après moins d’un kilomètre que je fais fausse route, ça ne colle pas… Je fais demi tour aussi sec et les trois autres aussi, ça commence bien! Suite a ce faux départ, je me retrouve derrière le n°82, une petite KTM 390 qui est partie après moi. Son pilote emmène cette petite moto légère et peu puissante, moins que la mienne c’est dire, en enroulant de manière très efficace, avec un minimum de freinage. Son rythme me convient parfaitement et il ne fait pas d’erreur de navigation, aussi je prends sa roue.

On arrive au point stop avec un peu d’avance, ce qui nous permet de sympathiser avant le pointage au Contrôle Horaire. Yves est un bordelais qui s’essaie au rallye après un an de compétition sur piste en KTM Cup en 2015. Après le CH, nous allons aborder la première base chrono, à parcourir a 55 km/h exactement. Yves me fait part de son inquiétude car il n’a rien prévu pas même un chrono, il a seulement son compteur de vitesse d’origine, imprécis et non étalonné.

je lui explique ma méthode et je l’invite à prendre ma roue: vu qu’il part 30 secondes après moi. Il devrait minimiser la pénalité en calquant sa course sur la mienne. Du coup il me propose de faire une course d’équipe. Je m’occupe de régler la vitesse et lui fait la navigation au road-book.

Nous appliquons notre stratégie et au 6e kilomètre je suis calé pile poil a la moyenne requise de 55 km/h, quand soudain Yves me fait des signaux frénétiques et s’arrête. il a loupé un embranchement du road-book… Erreur fatale!Le temps de retrouver la trace initiale et je constate que nous avons désormais parcouru 1.2 km de trop. il faut accélérer pour rattraper notre retard. Mais pas de chance le parcours emprunte justement une minuscule route pleine de boue et de gravillons… Pas facile de rouler vite.

Les kilomètres défilent et je recalcule en permanence le temps de parcours en fonction du détour de 1.2km et de la dérive de mon compteur kilométrique. je me prends un peu pour un astronaute posant sa capsule sur la Lune en contrôle manuel!! Quand au bout de 25 km nous passons la cellule de la fin de la base chrono, nous sommes à peu près dans les temps. Nous nous arrêtons brièvement et je vois la tête inquiète d’Yves; je le rassure: j’ai contrôle le truc ça devrait passer. Et effectivement ce sera confirmé lors des résultats le soir. Je suis dans la fourchette de vitesse autorisée et Yves prendra seulement une seconde de pénalité.

Notre stratégie a un peu foiré mais on a bien rattrapé le coup! Nous sommes bien décidés à faire mieux dans la deuxième base chrono du jour maintenant que notre équipe est rodée! Mais il faut d’abord rejoindre le point stop suivant, une formalité puisqu’une pause de 30 minutes est allouée pour le déjeuner. Ce qui nous laisse le temps d’avaler un sandwich et de faire le plein d’essence dans une station de village, à l’ancienne avec un vrai pompiste en chair et en os. ça existe encore dans notre beau pays!

Et c’est parti pour la deuxième base chrono. Cette fois nous sommes réglés comme des métronomes: Yves ouvre la route en lisant le road-book et il adapte sa vitesse sur la mienne en me surveillant dans le rétro. les kilomètres défilent et nous sommes chaque fois a quelques secondes du temps idéal. On devrait scorer cette fois! A 55 km/h de moyenne sur des routes plutôt rectilignes, ça parait interminable.

Peut être que Yves d’impatiente mais il roule trop vite et vers le km 27 je le vois s’éloigner inexorablement. Imperturbable, je conserve mon allure idéale quand tout a coup il a disparu pour de bon et j’arrive a un carrefour en T avec un stop. N’ayant pas du tout suivi le road book, je n’ai aucune idée où aller. Je consulte frénétiquement le road-book mais impossible de me recaler. Je vais tourner en rond pendant un moment jusqu’à ce que des spectateurs dans un patelin me fassent signe: « ils sont par là ». je file dans la direction indiquée à tombeau ouvert et enfin j’aperçois le signal indiquant la fin de la base chrono, et un peu plus loin Yves mon coéquipier debout a coté de sa moto. je m’arrête, il m’attend depuis au moins 10 minutes! Autant dire qu’on est complétement dans les choux sur cette épreuve. En fait au moment ou je l’ai perdu de vue, il y avait une embranchement à prendre vers une route minuscule que j’ai évidemment loupée. Ne me voyant pas arriver il s’est arrêter pour m’attendre et moi je me suis perdu…

Notre belle stratégie se transforme en fiasco total et nous finirons tous les deux derniers cette fois ci. Encore une bonne leçon: en rallye il faut être autonome et ne compter que sur soi même!

Et maintenant il faut encore rejoindre l’arrivée et le temps de liaison imparti est particulièrement juste… On repart ventre à terre. On rejoint un groupe de 3 motos et je prends la roue d’une KTM 690R immatriculée en Suisse. Je reconnais une petite suissesse, vaudoise plus précisément, qui roule vite et proprement. On va se tirer une sacrée bourre pour arriver ensemble dans les temps. Un grand moment de moto!

Malgré des performances contrastées aujourd’hui, avec le jeu des différentes pénalités qui touchent les autres concurrents, je suis toujours 70e scratch. ça pourrait être pire!

Ce soir je n’ai rien de particulier à faire à part assembler le road-book du lendemain. Dans le rush des préparatifs de la semaine dernière, je n’avais pas eu le temps de préparer tous les rouleaux. Ce soir je me refais donc une séance « ciseaux et scotch ». Avec l’habitue je vais plus vite!

Et cette fois je n’oublie pas de faire le plein de la moto et de nettoyer la visière de mon casque. Pour la première fois, je vais me coucher l’esprit tranquille , fin prêt pour le lendemain

2 thoughts on “Quand le travail d’équipe ne paie pas

  1.  » je recalcule en permanence le temps de parcours en fonction du détour de 1.2km et de la dérive de mon compteur kilométrique.  »

    Enorme celle la ! Le nouvelle album d’Hergé : « Tournesol fait le Moto Tour », ça se lit comme un roman !

    • Ah ah! N’empêche que maintenant je sais exactement comment faire pour ces bases chrono: un chrono + un compteur kilométrique étalonné (genre vélo AVEC fil car sinon interférence avec l’allumage) + calculer les temps de passage a chaque case du road book et le reporter en rouge dans le road book

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