Accrocs à la blanche…


Daniel Caen

Merci à Nicolas Cadet pour cette belle photo !

Quand l’hiver paralyse une bonne partie de la France et la grande majorité de la gent motocycliste, une frange d’irréductibles arbore un sourire béat et des pupilles dilatées à l’évocation du blanc manteau recouvrant nos routes et parant le paysage d’une virginale couche de poudreuse. Dans le cerveau de ce groupe d’allumés jaillissent des images de beaux dérapages, de longues glissades, de gerbes de flocons, de stalactites à l’extrémités des manchons, de bidouilles électriques pour inventer les calories, de volutes au-dessus des gobelets de vin chaud, de coups de mains dans le dos pour au pire pas reculer voire, au mieux, continuer d’avancer, de gros crampons ou de profondes rainures sur les pneus, et même de chaînes ou de clous pour les plus radicaux, les plus givrés d’entre nous.

Ce groupuscule a son langage, son vocabulaire, sa géographie, sa diététique. On y cause de Burle, d’Authentic, de Millevaches, de Cols-Blancs, et pour les plus extrêmes, d’Éléphants, de Pingouins, de Kristal. Ça dit « j’me suis tanqué » et non « je me suis enfoncé ». Ça échange des heures sur des recettes de tartiflette ou de croziflette plutôt que de déblatérer tout déprimés sur les régimes minceur d’après fêtes.

N’allez pas croire que ces drôles d’oiseaux sont des masos, qu’ils aiment à se cailler, non, rien de tout ça, bien au contraire, se confronter ainsi à l’absence de degrés comme au pas grand chose d’adhérence, c’est pour mieux sentir la chaleur qui coule au fond de nous et se sentir toujours plus vivant le visage fouetté par le vent, c’est comme le fameux chaud froid des douches dites écossaises, les baignades dans les hot spots islandais ou des séances de sauna finlandais qu’on n’apprécie vraiment qu’en environnement bien glacé, parce que quand le feu rencontre la glace, l’on peut s’attendre à tout plutôt que n’espérer plus rien.

Aussi, quand aux actualités on parle de routes fermées, de naufragés, qu’on cherche les responsables, les vrais coupables, qu’on réclame plus de pompiers, plus de policiers, qu’on assène que l’hiver, rouler c’est l’enfer, qu’on veut tout plus salé mais en même temps pas épicé, nous autres on songe plutôt qu’on est au paradis, au paradis blanc, mais pas d’un blanc d’hôpital, pas d’un blanc pour croix rouge, non, je parle d’un autre blanc, un blanc bien immaculé, un blanc plein de promesses, ce blanc qui étouffe les bruits mais pas la musique, qui arrondit les angles et aiguise tous nos sens, qui apaise le monde en ouvrant les esprits obtus, qui recouvre la grisaille comme le peintre enduit sa toile avant de se mettre à l’ouvrage, pour mieux mettre en valeur les couleurs, celles de nos copains, celles de nos engins, histoire de bien recommencer l’année, de repartir du bon pied une fois la dinde bien digérée, parce que la neige, quoi qu’on en dise, c’est drôlement mieux que la gaze pour panser les plaies de l’âme.

Et si ces irréductibles se voient souvent qualifiés de cinglés ou d’inconscients par ceux qui ne jurent qu’au nom de la sécurité, ceux-là même qui pensent qu’une vie terne les rendra immortels, et qui croient qu’à 80 à l’heure il ne leur arrivera jamais rien de grave quand ce qui est grave c’est qu’il ne leur arrivera jamais rien, c’est peut-être tout simplement que des individus qui aiment rouler en glissant, qui aiment aller de travers, et même complètement à l’envers, ce ne sera jamais facile de les faire rentrer dans le rang, et encore plus compliqué de les faire marcher au pas. Il n’est pas difficile d’imaginer que ce genre de personnage, dans nos mondes qu’on voudrait ultra-sécurisés, ultra-capitonnés, ça dérange, ça fait tâche, ça fait comme les étoile dans la nuit, ça donne à penser, ça donne à rêver, et surtout ça attire l’œil, et comme tout pilote le sait, là où l’œil regarde, les roues ne tardent pas à suivre…

Jumbo pluvieux… mais jumbo heureux


Daniel Caen

http://www.marie-louise.org/

Après l’Islande qui nous a bouffé tout le budget horizon pour les deux ans qui viennent, nous avons décidé de faire dans le local. Mais l’émotion n’est en rien une question de kilométrages. Comme un marcheur sur un sentier de randonnée, nous savons que face aux dénivelés, il faut savoir garder la même fréquence et raccourcir l’enjambée pour continuer d’avancer.

La vie est bizarre, parfois. Je vais à une vente d’affiches de cinéma (une autre de nos passions… le cinéma, pas les affiches…) dans notre petit ciné de quartier. Cette vente est au profit de l’association Oscar’s Angels (des bénévoles de l’hôpital pédiatrique). Du coup (Pourquoi j’ai dit ça ? Comment ça vient une idée ?), je leur propose d’organiser un jumbo. Sauf que j’y connais rien en jumbo. Alors, je commence à farfouiller dans le net, à appeler au secours sur les réseaux sociaux, et puis je tombe sur un forum où ça cause d’un jumbo qui doit avoir lieu aujourd’hui à deux pas de chez nous… Quand la vie vous chante ainsi à l’oreille, on est libre de la suivre ou pas, mais si on la suit, on n’est jamais déçu. C’est un secret que je vous donne. Chacun en fera ce qu’il voudra mais vous ne pourrez pas dire que je ne vous l’ai pas dit… De toute évidence, ça tombe bien, y’a un désistement auquel notre inscription à l’improviste pallie… Oui, qu’on le veuille ou non, quand on veut bien suivre sa partition, c’est tout l’orchestre qui sonne mieux…

C’est ainsi que nous avons participé à notre premier Jumbo Run. Un Jumbo c’est quoi ? Puisque d’autres, bien avant moi, l’ont parfaitement expliqué, et que faire et refaire ça n’est pas avancer, profitons : http://mc8.60.free.fr/momment_vie/2008/06_jumbo_run.htm

La météo n’est franchement pas de la partie mais comme tout le monde le sait les gens du nord ont dans le cœur le bleu qui manquent à leur décor et ce jumbo est à une vingtaine de kilomètres au « nord » de chez nous, à Gratentour, à la maison d’accueil spécialisée pour ado et adultes polyhandicapés fondée par l’association Marie-Louise. Si dans l’imaginaire collectif, un mariage pluvieux annonce un mariage heureux, c’est parce qu’un couple qui continue d’avancer malgré l’adversité des éléments le jour de leur union est prêt à affronter toutes les difficultés auxquelles la vie ne manquera pas de les confronter. Bien des parents et des soignants de la M.A.S de Gratentour ont dû connaître ce genre de noces tant l’amour qui les porte leur fait gravir quotidiennement de sacrées hautes montagnes. Avoir l’occasion de leur apporter un peu de bonheur, en faisant ce qu’on fait d’ordinaire sans y penser, est une occasion à ne pas manquer.

Nous y sommes accueillis en compagnie de 5 autres sidecaristes par Fanny, l’organisatrice. Un sacré bout de femme, Fanny, pas plus haute que trois pommes mais dotée de l’énergie d’une bombe H et d’un sourire à faire fondre le plus misogyne des hommes. Le genre à aller bien au-delà de sa fiche de poste. Le genre à vous secouer la planète pour en recueillir les meilleurs fruits. Et aussi la fille idéale pour me donner toutes les infos dont j’aurai sans doute besoin si je veux aller jusqu’au bout de mon projet initial.

Fanny à la baguette : Plus forte que les éléments…

Mais nous n’en sommes pas là, nous sommes là pour faire quelque chose que nous aimons et pour lequel, quelle méprise, on ne cesse de nous remercier : Rouler en side ! Un don du sang, un don de soi, à part pour les masos qui aiment les piqûres, ça exige un certain dépassement. Rouler en side, c’est que du plaisir, et le partager avec d’autres, c’est encore plus fort. Y’a pas de mérite ! Heureusement qu’il a plu, ça donne l’impression qu’on a fait des efforts. Mais les efforts, ce sont les parents qui les ont faits, ceux qui ont créé l’association, qui ont fondé la structure, pour pallier à l’insuffisance des pouvoirs publics pour qui il est plus porteur de supprimer des impôts que d’expliquer à quoi ils servent.

Jumbo pluvieux ? La preuve…

Ils devaient être trois solos pour nous escorter, un seul a assumé sous la flotte : Merci à lui !

De face, il pleut encore…

Dans la journée, nous avons fait 5 rotations d’une quinzaine de kilomètres. A chaque fois, la même chose : des sourires, des étincelles dans les yeux des résidents et de leurs parents, des remerciements à la pelle que ça en devenait gênant, et une Fanny à la baguette en grande ordonnatrice à l’énergie inépuisable. L’ultime sortie fut celle du personnel et de quelques parents, ce fut aussi la seule au sec, comme un remerciement des cieux, du coup on a pu se lâcher un peu au niveau pilotage, et offrir de nouvelles belles sensations à nos derniers  passagers en contact direct avec les éléments, les paniers enfin décapotés.

Enfin, à l’air libre !

Pour cette super journée et ces très belles rencontres, Fanny, David, Lucas (entre autre, pour son goût très sûr en matière de side-car, en effet ce dernier ne voulait monter que dans le tout rouge, en l’occurrence, le nôtre…) et tous les autres, au nom de tous les sidecaristes (ça j’en suis certain), à mon tour, je vous remercie.

Une fine équipe !

Finalement, cette pluie omniprésente n’était-elle pas de la part des nuées que larmes de bonheur en voyant combien les humains, quand ils réunissent leurs forces au-delà de leurs différences, parviennent à allumer des étoiles jusqu’au plus profond de la nuit noire ? Je me le demande…

De Toulouse à Helsinki etc… On ferme !


Daniel Caen

Le chat et son tarmo de popa au départ d’Helsinki

Toute histoire doit trouver sa conclusion et celle de ces cinq mois passés en votre compagnie à préparer puis à accomplir ce projet de transport scolaire quelque peu pervers ( traverser l’Europe pour récupérer sa fille à la sortie de l’école, vous conviendrez avec moi que le qualificatif n’est pas usurpé…) n’échappera pas à la règle.

D’abord quelques chiffres :

7700 kms en 14 jours au travers de 16 pays (dans l’ordre : France, Luxembourg, Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Danemark, Suède, Finlande, Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République Tchèque, Autriche, Italie, Monaco) en ayant brûlé près de 500 litres de super95 (sur l’ensemble du voyage et malgré son embonpoint, Miss The XJR aura consommé un modeste 6,45l/100 à 1.55 euros le litre en moyenne). Malgré le dépassement du kilométrage en raison de quelques improvisations, le budget a été mieux que tenu : + ou – 2000€ (carburant : 780€, logements 530€, ferry 200€, nourriture 330€, péages des 2 ponts et de la Grossglocknerstrasse (75€) et le reste en babioles souvenirs, glaces et autres boissons…

Voici le détail des itinéraires effectivement parcourus dont avaient été bannies autoroutes à péages et autres vignettes :

le 1er juin 890km : http://goo.gl/maps/LvSGZ

Miss The XJR et sa copine… Mémée Béhème… si si.. à Nancy

le 2 juin 773km : http://goo.gl/maps/UHigy

Miss The XJR, une vrai européenne…

le 3 juin 892km : http://goo.gl/maps/FGkOT

à Nyborg au Danemark, ça fleurait bon l’été…

le 4 juin 852km : http://goo.gl/maps/su4CA

Mon petit déj’ suédois…

le 5 juin : Ferry Stockholm Turku

Soleil de presque minuit…

le 6 juin 261km : http://goo.gl/maps/pIi2c

Pas perdus…

le 7 juin 324km : http://goo.gl/maps/fB1y8

Quand deux chats se rencontrent sur le marché de Riga…

le 8 juin 721km : http://goo.gl/maps/6bcEf

à Varsovie, le menu, on l’a pas tout compris…

le 9 juin 663km : http://goo.gl/maps/ZKyPH

à Prague, de drôles de deux-roues pour de drôles de touristes…

le 10 juin : Repos Prague

le 11 juin 563km : http://goo.gl/maps/d1YZQ

Mauthausen… pour ne jamais oublier.

le 12 juin 552km : http://goo.gl/maps/febGP

Quand les Alpes Autrichiennes nous mènent en bateau…

le 13 juin 614km : http://goo.gl/maps/AN44u

Le renne Finnois du Chat, entre Helsinki à Monaco, il en aura vu quelques-uns des jolis paysages…

le 14 juin 592km: http://goo.gl/maps/lptvj

L’amour et la passion… sur fond de briques rose…

Si vous souhaitez d’autres renseignements, n’hésitez pas à demander

Ce que je retiendrai de cette balade très européenne ?

Le sentiment de liberté quand on franchit autant de frontières sans jamais avoir à montrer ses papiers… La frustration de n’avoir pu revenir d’Helsinki à Tallinn par voie terrestre via Saint-Petersbourg (distant d’à peine 300kms de la capitale finlandaise) parce que la liberté de circuler est vilain gros mot pour certains si elle ne s’accompagne pas de visa, de passeport et de tant d’autres murs à faire tomber si l’on veut un jour que le nom « Humanité » cesse d’être celui d’un journal pour devenir celui d’un seul et vrai peuple. Le plaisir d’avoir pu utiliser les quelques mots de russe appris il y a bien longtemps, en prêtant assistance à une touriste moscovite et non angliciste en crise de panique à Helsinki, en commerçant avec une épicière dans un trou de Lettonie ou en plaisantant avec une babouchka sur le marché de Riga, donnant ainsi un peu de sens à cette bizarrerie de ma brève scolarité… Le bonheur de faire découvrir les joies du road-trip à ma fifille le Chat avant de la voir s’éloigner pour cette non moins grande aventure qu’est celle de la vie de couple. La fierté d’avoir démontré que Miss The XJR n’avait pas besoin d’être une béhème pour être une aventurière. La tristesse de visiter le camp de Mauthausen en me disant que petit à petit le souvenir des horreurs nazies s’efface tandis que les scores de l’extrême-droite européenne progressent. L’agacement de me retrouver embouteillé dans Salzburg par l’étroitesse d’esprit de certains conducteurs autrichiens… sans doute les mêmes qui votèrent pour Kurt Waldheim ou Jörg Haider malgré l’ombre spectrale de Mauthausen… Oui, je sais, ils ne sont bien sûr pas tous comme ça nos amis Autrichiens… mais puisque ça m’agace, ça m’agace…La trouille que le GPS tombe en panne de batterie en pleine nuit dans Milan alors que l’on avait enfin retrouvé notre chemin vers l’hôtel. La petite et très mesquine jouissance ressentie en papotant dans un bouchon monégasque avec un tarmo très aisé qu’aurait bien aimé faire le même voyage que nous mais qui pouvait pô parce que du temps il en avait pô démontrant que même avec une très grosse moto et de très bô z’habits, il était sur un certain plan bien plus pôv’ que nous… Le vertige face à la sidérante beauté des eaux turquoises du Verdon creusant toujours plus profond son tombeau de pierre grise  La lassitude face au longues lignes droites bordées de pins en terre scandinave et, au contraire, la douce griserie due aux enchaînements des jolis virolos des routes alpines.

Le plus bô chemin d’un point à un autre, c’est la courbe…

Et encore tout plein d’autres choses et de belles émotions, que je ne détaillerai pas davantage sinon mon blog s’appellerait un roman, mais qui sont les vraies bonnes raisons de continuer à tailler la route, cette route qui de Toulouse à Helsinki, du dodo au boulot, ou du berceau à la tombe, s’éclaire au rythme de nos émois faisant de chaque rencontre et de chaque paysage un morceau du miroir où disparaît celui que l’on croyait être et où se révèle celui que l’on croyait perdu.

Quant à la suite des événements, Miss The XJR va changer de propriétaire, l’un de mes fistons l’emmenant faire un p’tit tour en Corse ; et après l’été, SylvieJolie et moi allons nous mettre en quête d’un attelage « nice and cheap » pour nous projeter dans un nouveau périple genre le Cap Nord ou un Toulouse-Moscou à accomplir d’ici 4 ou 5 ans… le temps de se familiariser avec notre nouvel équipage et de reconstituer le pécule nécessaire… Bref de nouvelles aventures et peut-être un nouveau blog à venir…

Comme dans tout générique de fin, mes remerciements iront à MotoMag pour m’avoir « hébergé », à Fred Jeorge pour sa virtuelle compagnie et ses très bons conseils, à Maxxess Toulouse et Joël pour leur soutien matériel, à Joanna pour son assistance technique vidéo, à mémée Geek pour plein de choses, à SylvieJolie pour plus encore, au Chat pour cette bonne idée d’un Erasmus à Helsinki, aux muses qui m’ont bien amusé, aux très bêtas testeurs de chez béhème pour le scoop mooonnnnndiaaaallll et à tous ceux (enfants, parents, amis et autres…) qui m’ont suivi et soutenu au travers du Blog et de ses commentaires.

Amitiés motocyclistes et bonne route à tous…

GUIDE DE LECTURE

Mis en avant


Daniel Caen

Pour les néophytes et les béotiens, pour les mamies, les mémées, les pépères, pour les réfractaires et pour les autres aussi, voici comment s’y retrouver dans ce fatras foutraque qu’est devenu mon blog.

Juste à l’étage en dessous, tu découvriras le dernier chapitre que j’aurai écrit. En déroulant vers le bas, les plus récents tu remonteras mais quand tu cliqueras sur articles plus anciens, ça ne fonctionnera pas et les mêmes tu retrouveras. Donc, sur le côté, dans les rubriques, tu farfouilleras, ou en allant sur un chapitre précis, en cliquant en haut sur précédent ou suivant, le temps tu remonteras. Bonne lecture.