Stop; douane!

Kiakhta n’a pas dû aimer que je la traite de garnison. Elle s’est servie de sa douane pour me forcer à rester un peu plus longtemps.  Passer une douane un weekend, ça a l’avantage d’accélérer le processus, il y a moins de monde, on est contrôlé tout de suite…Passer une douane un weekend, ça a le désavantage que pas mal de fonctionnaires préfèrent être en famille qu’en poste ; en l’occurrence, celui qui aurait pu, éventuellement, régler mon problème,  ne sera là que lundi…Kiakhta a voulu me garder, me forcer à  découvrir qu’elle n’est pas qu’une garnison : soit, je serai beau joueur. Je me déniche un hôtel  avec wifi au centre ville,  puis une espèce de guinguette où je peux dessiner et casser la croute, me voilà installé, je peux partir en visite.

Kiakhta, m’explique le livre , connut son heure de gloire jusqu’à la construction du Trans-Sibérien. La rue principale bordée de garnisons est en réalité la première déviation pour éviter le centre. Elle se termine en cul de sac dans ce qui fut , sans doute, le poste frontière jusqu’à la  Pérestroïka; tout au bout, on bute sur une palissade grillagée et derrière il n’y  a que des rangées de barbelés, de l’herbe, des ronces, rien. Arrivé là, il suffit de se retourner et de s’imaginer passer la frontière au temps de l’Union Soviétique…la route s’avance jusqu’à un ancien portail grillagé qui devait être la sortie des contrôles…à gauche une grande église, à droite, derrière la statue de Lénine, l’ancien gigantesque bâtiment des douanes. Il date du dix neuvième siècle, s’arrêtaient là tous les convois venus de Chine par la Mongolie…J’ignore quel est donc ce style oriental avec fronton et colonnades, mais ce qui est amusant et grotesque à la fois, c’est qu’à côté de la nouvelle douane, planté de la même façon, juste à la sortie, il y a un supermarché tout neuf, « Absoliout », avec les mêmes colonnades que son ancêtre mais en plastique rigide et devant, à la place de Lénine et de la frise à la gloire des travailleurs, il y a une grande enseigne « Cash and Carry »… décidément, on a vraiment plus les mêmes valeurs !La nouvelle douane est juste à cinq cent mètres de l’ancienne, mais une déviation de dix kilomètres y amène directement depuis la route nationale en évitant toute la ville qui, une fois de plus, après la construction de la voie ferrée puis de la nouvelle route, s’est ainsi vue rétrogradée au rang de bourgade pour soldats perdus aux confins de l’Empire…

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