Douaniers, flics, lac et montagnes…

Il a plu et on a eu froid, mais nous étions bien les premiers puisque nous étions les seuls. Après avoir expédié mon cas en quelques instants, ils se sont penchés sur celui de mon coloc. Le douanier est une espèce qui mériterait un roman de cent mille pages rien que pour elle. Mais on pourrait presque lui pardonner. Comment ne pas vouloir se garder un cas particulier quand on passe sa vie sur un plateau hostile où ne passe presque personne ? Le douanier hésite entre sympathie et autorité, il cherche le compromis pour garder l’attraction le plus longtemps possible sans être totalement ignoble ni passer pour un laxiste. Comme ils me trouvaient encombrant, puisque j’étais en règle, après avoir rapidement contrôlé deux retraités de Haute Loire en partance pour la chine en camping car,  ils ont insisté pour que je continue tout seul. La douane du Kirghistan se franchit tellement vite que deux kilomètres plus loin j’ai croisé les retraités qui avaient fait demi tour, à la recherche du poste frontière Kirghize qu’ils avaient pris pour le tampon de sortie du Kazakhstan. Quand ils ont compris que ce tampon rapide comprenait bien la totalité des formalités, ils m’ont invité, en attendant Féderico, à boire un café à l’abri du vent qui fouettait le plateau herbeux.  Tout le monde a fini par reprendre sa route sans encombres…De ce côté de la montagne, la piste descend vers une grande plaine agricole, coincée entre deux chaînes de montagne. Les arbres sont à nouveau revenus ; bouquets de saules, allées de peupliers et vergers de pommiers donnent à cette vallée un petit air familier. Il paraît que c’est de ces coteaux d’Asie Centrale que sont originaires les pommiers que les croisés ramenèrent d’Orient, il y a quelques temps déjà… Petit à petit, les hameaux perdus se transforment en villages, et la piste en route goudronnée. On arrive au bord du grand lac tiède et salé qui ne gèle jamais et on trouve enfin un petit bourg où changer des sous, faire le plein et se nourrir un peu aussi ; parfois c’est nécessaire. L’ambiance est pourrie, les pochtrons habituels assez envahissants et la flicaille locale à la recherche de petits profits faciles. Quelques gouttes derrière un buisson pour éviter les chiottes immondes ont failli me valoir une extorsion de fonds, mais Féderico, plus réveillé que moi, a bien joué celui qui allait appeler son « ami bien placé à Moscou » et on a pu repartir. La route est longue le long du lac Issik Koul, avec à droite l’Alataou embrumé et à gauche, derrière le lac, l’immense chaine de hauts sommets du Tian Shan, la seule vraie muraille de Chine digne de ce nom derrière laquelle, d’ailleurs, nous guette l’Empire du Milieu.  

One thought on “Douaniers, flics, lac et montagnes…

  1. Ce qu’ils sont prêts à faire pour un autographe les policiers! super rencontre qu’est Frederico! On ne peut lui reprocher son manque d’equipement quand on brûle ses tongues sur le carter de la bmw! haha

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