On s’installe à Omolon.


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On a descendu la moto de la benne. Elle a redémarré sans problème et pendant que Yura déchargeait ses palettes de poulets et de pâtes, j’ai remonté les skis sur le cadre et puis j’ai fait quelques tours de parking entre les camions avant de retrouver assez de confiance en moi pour tenter un essai sur route et me planter quelques mètres après la sortie, sous les regards des camionneurs hilares. Il va falloir que je m’entraîne un peu, une route enneigée n’est pas le Baïkal, et si on négocie mal une ornière, on est bon pour la sortie de route.

Après cette remise en forme, je suis retourné voir Vassili avec mon dossier sous le bras. Il avait l’air contrarié, mais il m’a dit de ne pas m’inquiéter. On a donc fait une longue déclaration traduite en anglais et en français pour essayer d’expliquer comment j’étais arrivé là sans autorisation. Officiellement, je suis tombé en panne de l’autre côté de la frontière et c’est un camion en route vers Omolon qui m’a sauvé la vie et m’a ramené au garage. Il semblerait que cette version me permettra de continuer sans complications. Olga , que j’ai pu contacter discrètement grâce à la connexion, me rassure par message ; elle m’écrit que c’est juste un petit flic qui fait du zèle, que ça va s’arranger… Le soir est tombé et Andrej, le traducteur, propose de m’inviter pour le repas du soir ; il veut s’excuser Andrej, s’excuser de cette bureaucratie envahissante, me montrer que l’hospitalité russe ce n’est pas ce que je viens de vivre… il a aussi invité deux amis du Daghestan, venus ici pour trouver du travail et l’inévitable Vassili, toujours sur sa réserve, même après quelques bières… et puis je suis rentré, Ali, un des deux daghestanais, a voulu me ramener dans son sidecar Ural, mais ça n’a pas voulu démarrer. Ali s’énervait sur son kick, démontait ses bougies. Je lui disais que je pouvais rentrer à pied, qu’il n’y avait qu’un quart d’heure de marche mais non, pas d’offense à l’hospitalité russe, je suis prié de patienter dans la carcasse de métal glacé de son vieux panier. Il abandonnera au bout de dix minutes et me laissera rentrer dans la nuit submergée par les hurlements des chiens.