Une petite virée betteravière de plus en Triumph Explorer 1200…


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C’est quelque part sur l’autoroute de l’Est, dans ces zones pas vraiment artisanales construites au milieu des champs, juste quand la banlieue s’arrête de pousser pour être remplacée par du blé ou du colza. C’est là, Triumph France, et comme l’année dernière, en cette même période d’été encore frais, je vais récupérer une moto toute neuve qu’on me prête pour une dizaine de jours.

L’Explorer 1200: prise en main en duo…


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C’est quand même cool de faire l’essayeur, on débarque avec sa vieille pétoire, on la pause dans un coin et on repart avec une nouvelle machine toute préparée moteur chaud, clé sur le contact, c’est parti. Il y a d’abord un petit debriefing ; les motos, quand on est un vieil habitué, c’est toujours un peu pareil à l’usage et après dix minutes, on est déjà chez soi…en fait, le debrifingue, c’est surtout pour l’ordinateur de bord. Là, c’est une autre paire de manches, d’ailleurs j’ai tout oublié dès que j’ai pris la route. Cruise-contrôle, antipatinage multifonction, ABS et débrayages divers, tout ça activés avec quelques petits boutons sur les deux commodos, il va falloir rappeler le conseiller spécialisé quand j’aurai besoin de changer de programme. En attendant, je suis en version route et je la prends la route, en n’oubliant pas ma passagère parce que quand on a la chance de profiter d’une limousine à deux roues, ce serait bien dommage de ne pas partager ce plaisir tout neuf… Au premier coup d’œil, l’Explorer paraît assez gigantesque . Mais une fois le pilote encastré entre le réservoir et l’étage passager, les pieds sont finalement bien au sol et contrairement aux premières Tiger 900 qui semblaient réservées à une élite de plus d’un mètre quatre vingt, les nouvelles peuvent facilement être prise en main par des nains de dix centimètres de moins, ce qui, vu le poids de la bête, est plutôt une bonne surprise. La passagère, quant à elle, est logée à l’étage supérieur. Les nouvelles ergonomies de moto n’incitent plus vraiment aux enlacements sensuels sur petites routes de campagne, la morale a triomphé et désormais, on fait chambre à part. Si la passagère veut enlacer son pilote préféré, elle n’a plus accès qu’à son casque qu’elle surplombe en impératrice et, à moins d’un intégral unis noir laqué dans lequel elle peut toujours admirer ses cheveux faire des nœuds dans son dos, à moins donc de cette option miroir, elle ne pourra que lutter contre les turbulences en regardant défiler les vertes campagnes de Picardie.

La bécane de Proust…


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Comme l’année dernière, je suis remonté au pays des histoires belges, les histoires de famille, j’entends bien. Je suis donc revenu dans la grande maison familiale, vide depuis presque trois ans, pour nettoyer, vider, ranger, préparer le lieu de l’enfance à devenir autre chose en d’autres mains. Quand on pénètre dans la maison familiale abandonnée, les odeurs des temps anciens envahissent instantanément la totalité de l’être, c’est l’effet proustien de la madeleine, on retombe au pays de la goutte au nez et des gaufres au sucre, on replonge en enfance. Les odeurs ont un pouvoir magique sur la mémoire et il en existe une autre, plus précise et moins bucolique, mais qui me projette immédiatement quarante ans en arrière, c’est le parfum viril d’un bloc moteur tout  neuf.       Une moto qui démarre pour  la première fois dégage toujours une odeur de métal chaud très particulière. L’aluminium et les chromes à peine sorti de l’usine finissent sans doute de cuire pendant les premiers kilomètres et le plus subtil privilège d’être devenu essayeur occasionnel, c’est sans doute celui-là ; démarrer, faire tourner quelques secondes, fermer les yeux et se revoir en ce jour lointain de la fin soixante quinze. Ce jour-là, j’ai pressé pour la première fois  sur le démarreur de ma Honda 500 four et  cette odeur métallique s’est irrémédiablement gravée dans un endroit de mon cerveau, la bibliothèque des odeurs, entre le plancher ciré et les gaufres encore chaudes.

Un peu de gymnastique avec le gros trail Triumph1200…


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Bon, faut pas déconner, je suis là pour un essai alors j’essaye. Le béquillage sur la centrale, c’est du velours, relever la bête tout seul après l’avoir couchée juste pour le test, on y arrive sans trop de problème, même avec une carrure de pêcheur à la ligne, manier à l’arrêt, arrimer les bagages, tout baigne, même si le porte bagage un peu étroit semble surtout prévu pour accrocher une brosse à dents ou un top case. J’ai déjà parlé de ce que la gamme Tiger avait gagné en maniabilité grâce à cette prouesse inexplicable d’un centre de gravité placé bas alors que le trois-cylindres semble naturellement  devoir porter le poids au niveau des genoux. Cette prouesse d’ingénieur, dont personne n’a encore réussi à m’expliquer le secret, doublée d’un  impeccable rayon de braquage, fait de cette machine une rivale parfaite de l’inébranlable GS Béhème.

Promenade en forêt en Triumph1200…


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Sur l’autoroute, la route nationale ou le petit trajet campagnard et sinueux, partout l’ Explorer  est à l’aise, la boite est un peu ferme et les assistances diverses provoquent parfois à bas régimes, des petits claquements désagréables, mais ce moteur est quand même diablement séduisant… Une certaine appréhension peut saisir le pilote quand il doit jeter sa machine dans les embouteillages urbains, mais son équilibre remarquable permet presque le surplace malgré la masse de l’engin et ça c’est une bonne surprise . Alors que demander de plus ? De la piste bien sûr, mais oserais-je tenter ça avec une machine de ce prix et de ce poids équipée de pneumatiques pas vraiment prévus pour ça ? Il va bien falloir, non ? C’est la loi du test complet; alors il  faut y aller, surtout que, on peut s’en douter, j’adore ça.

Les suspensions sont plutôt fermes mais l’équilibre, une fois encore fait la différence et le couple du 1200  m’a même permis de sortir des ornières boueuses des forêts de la Marne, malgré des pneus de route enclins par nature au patinage  pas du tout artistique. 

Alors bon, je la prends cette monture? Je la prendrais plutôt; usons donc du conditionnel, c’est pas gratos ce genre de machine et même si ça frise la perfection, oserais-je m’aventurer dans les steppes d’Asie Centrale avec toute cette électronique, qui, même si elle permet des montures parfaites sur nos routes européennes, n’autorise pas franchement les bricolages de bord de piste!

Fin de mini balade…


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J’ai dû la rendre après dix jours, ma nouvelle Triumph 1200 de super méga frime. C’est le revers de la médaille du prêt pour pro, à peine la monture totalement apprivoisée elle doit rentrer à l’écurie pour  être refilée à je ne sais quel gougnafier qui ne pourra que la malmener…c’est la règle ! Je récupère mon vieux flat de trente balais et je rentre à la maison en me disant que finalement, un bon vieux moulin sans un gramme d’électronique embarquée, ce n’est pas mal non plus, c’est ma vie et je la reprends tranquillement en  humant les odeurs de foin le long de l’autoroute…et puis je n’oublie pas que dans un mois, je repars loin, vraiment loin, comme avant. Mais bien entendu, je vous tiendrai au courant…