La société française In&motion a confié à 500 motards européens un gilet airbag de présérie afin de recueillir les avis en utilisation réelle et ainsi finaliser son produit en vue d’une commercialisation en 2018. Etant un de ces motards, je relate dans ce blog mes impressions sur cette expérience. Si vous avez manqué le début, voir les épisodes 1 et 2.
Airbag et Manx Classic TT, le choc des cultures !
Mon road-trip estival m’a amené fin août sur l’Ile de Man pour le Manx Classic TT et le Manx Grand Prix (MGP). Le Classic TT, c’est la version « vintage » du célèbre Tourist Trophy, qui lui, se déroule début juin. Ce sont donc des machines anciennes qui empruntent le circuit routier de 60 km et 260 virages, avec des pilotes ayant souvent aussi un âge bien avancé, mais aussi des tops pilotes du TT comme Michaël Dunlop ou Bruce Anstey. On est donc dans un univers mécanique traditionnel, loin des assistances électroniques désormais présentes sur les machines modernes. Pour autant, un airbag est loin d’être incongru dans cet environnement, car les risques de blessure en cas de chute sont très élevés.
Le MGP, c’est le passage obligé pour les « newcomers », en moderne cette fois, avant de pouvoir accéder au TT de juin. On retrouve donc des machines récentes, et ça roule très fort pour les meilleurs, Michaël Evans en particulier.
Je n’ai pas vu de pilotes avec des airbags, mais il est vrai qu’une solution intégrée dans une combinaison n’est pas forcément visible. Je pense malgré tout que le taux d’équipement en airbag est faible.
Quelques pilotes français sont présents, comme Thimothée Monot ou Nicolas Pautet, avec qui nous avons pu discuter longuement suite à son abandon sur problème technique à Glen Helen où nous regardions la course MGP Senior. Très intéressant de comprendre la démarche et la gestion des risques de Nicolas, c’est tout le contraire de l’improvisation et de la prise de risque inconsidérée.
Long way road
L’ile de Man, c’est en mer d’Irlande, il faut déjà se rendre sur la côte ouest de l’Angleterre, à Heysham, pour prendre le ferry, soit 850 km depuis Paris avec une traversée de la manche par le shuttle. Largement le temps d’apprécier (ou pas!) le fait d’avoir le gilet In&motion sur le dos. J’ai longuement hésité sur mon équipement : veste textile 3 en 1 pratique et aérée ou blouson cuir avec son beau look vintage, cruel dilemme ! Finalement, ce sera la veste textile, plus polyvalente, dans ces contrées souvent humides.
En roulant, même après une longue journée, le gilet n’est pas du tout gênant, on sent juste sa présence, cela a d’ailleurs un côté rassurant. A l’arrêt ou à basse vitesse avec des températures élevées (si, si, c’est possible en Angleterre), l’ouverture des aérations de ma veste a suffi pour rendre la situation tout à fait supportable.
L’autonomie annoncée est de 20 heures en continu. A l’usage, on doit recharger au soir du 2ème jour, pour des journées de roulage complètes, en ayant éteint le système lors de la pause du midi. Reste qu’en roulant, on ne sait pas quand le système va s’éteindre faute de batterie, mais des évolutions sont en cours d’étude sur ce point.
En mode touriste
Une fois arrivé à destination, on est en mode touriste, avec des petits trajets et de nombreux arrêts au cours de la journée. C’est dans ces conditions que ce type d’équipement se fait sentir, car se promener à pied dans un village avec le gilet et la veste devient pesant, dans tous les sens du terme. Et dans ces conditions, on peut vite avoir chaud. Reste donc la solution de retirer le gilet (après avoir retiré la veste), de l’éteindre, de le mettre dans une valise ou un top-case, pour autant qu’on en ait et qu’il reste de la place. Ce n’est pas forcement le cas en itinérant à deux. Autre solution, utiliser un grand câble antivol passé avec la veste.
Cette problématique n’est pas exclusive au gilet, simplement, il s’ajoute à la liste des équipements qu’un motard raisonnablement équipé porte sur lui pour rouler, et risque de devoir porter aussi en ballade pédestre pour une visite : casque, bottes, veste / blouson, pantalon peu aéré, gants.
500 motards sur les routes
Les 500 motards « insiders » de l’expérimentation In&motion ont, comme moi, profité de l’été pour sillonner les routes. Nous approchons les 500 000 km cumulés, enregistrés par les gilets et remontés à In&motion via internet.
Et si jusqu’en juin, il n’y avait pas eu de chute, nous en sommes désormais à 8, avec 5 déclenchements d’airbag. Pourquoi pas 8 ? Parce que 3 chutes ont eu lieu à l’arrêt ou quasi arrêt, et c’est un choix de paramétrage du fabriquant, afin d’éviter des déclenchements inutiles : imaginez, vous vous asseyez un peu brutalement avec votre gilet sur une chaise, et paf, l’airbag se déclenche. Il y a donc un compromis nécessaire à trouver.
Concernant les 5 déclenchements, difficile de dire dans quelle mesure le gilet a limité les blessures. Toujours est-il qu’il n’y a pas de blessure grave touchant les vertèbres par exemple.
On ne compte pas la chute de Jonas Folger au grand prix de Silverstone en août, qui a dû sauter de sa moto à près de 300 km/h suite à une défaillance de frein. Il est équipé de la version « piste » du système In&motion, intégrée dans sa combinaison. Il s’en est d’ailleurs bien sorti, vu la chute.
Enfin, pour ma part, toujours pas de déclenchement, et j’avoue ne pas être pressé de savoir l’effet que cela fait !
A suivre …
Je ferai un point le mois prochain sur le marché et l’usage en général de l’airbag à moto, sur ma perception et mon avis après quelques mois d’utilisation. Suis-je désormais acheteur ? (je sais, je vous l’ai déjà dit le mois dernier, mais pour de vrai, ce sera le mois prochain !)
En attendant, pour les plus curieux, je vous invite à consulter le résultat de l’enquête sur l’airbag en 2 & 3 roues réalisée par 2-roues Lab’, le laboratoire de la Mutuelle des Motards. Lisez aussi le très intéressant dossier « Airbag » rédigé par Yannick Leverd dans Motomag n° 326 (avril 2016) : règlementation, techniques, essais, perspectives, tout est passé au crible ! Le gilet In&motion ne faisait pas parti des tests, n’étant pas encore disponible.
Rendez-vous donc le mois prochain , et comme l’indique ce panneau de l’Ace Cafe à Londres, protégez-vous !
Merci beaucoup pour tes retours sur cet airbag 🙂
J’ai aujourd’hui celui d’alpinestars (j’en suis très satisfait, contrairement à celui de dainese que j’ai utilisé pendant un an avec que des problèmes…) mais j’essaye de suivre de prêt les innovations dans la protection de notre hobby.
J’ai une remarque (si tu as la possibilité de faire suivre ou de nous dire si ils ont déjà une réponse sur le sujet), mais pourquoi font ils la même erreur que beaucoup d’équipementier, à savoir oublier la protection du haut des épaules !!??
Sérieusement, sont ils accompagnés par des medecins qui pourraient leur faire un retour sur les blessures couramment constatées sur les accidentés 2 roues ?
Franchement… plus de 50% des chutes sur le côté (a part les chocs frontales, et encore… la probabilité de frapper le sol sur le côté est très grande…) provoquent des fractures compliquées de l’humérus et/ou de l’articulation claviculaire…
On voit les airbags piste qui protègent ces zones, pourquoi pas les airbags route ?
Donc entre ce manque plus la dorsale qui n’est pas niv2… moi je préfère opter pour plus de protection et laisser de côté le marketing des app smartphone et des arguments « tu auras la classe tu pourras garder ton blouson »…
Dommage 🙁
Bonjour,
Ton témoignage est intéressant, et s’il est certain que la sécurité devrait primer sur le look, on sait que ce n’est pas toujours dans ce sens là que cela se passe. On voit plus de pots Akra que de gilets airbags, ça vaut à peu près la même somme. Concernant la conception du gilet In&motion, j’avoue ne pas savoir répondre à ton interrogation sur la protection du haut des épaules. La partie gonflée entoure l’épaule, mais sur un choc latéral (fréquent), l’efficacité du coussin est limitée. L’expérimentation en cours servira au fabricant à faire évoluer le produit tant pour l’aspect usage que pour l’aspect protection avec l’analyse systématique des accidents (conditions, déclenchements, blessures, …).
A suivre …
Bruno