Après quelques jours au Paraguay et une traversée de l’immense et désolé Chaco, nous avons atterri à Salta, la grande ville du nord Argentin. Une ville agréable située au fond d’une cuvette, et entourée de montagnes. Avec la Cordillère des Andes et ses altitudes extravagantes, il faut bien admettre que jusqu’à présent, nous avons surtout fait la politique de l’autruche. Or, toutes les histoires maintes fois entendues au sujet de soucis liés à l’altitude nous sont vite revenues en mémoire…
Pour donner un ordre d’idée, Salta est déjà située à 1200 m d’altitude. Autant dire que dès qu’on quitte la ville, le moindre relief nous projette à plus de 2000 m et dès que la route/piste prend une inclinaison ascendante c’est dans la zone des 3000 m que se passe la vie normale.
Mais ça c’était au début.
Nous, encore naïfs et innocents comme l’agneau qui vient de naître, on se contentait de trouver ça beau et, accessoirement, d’être émerveillés par le décor. Puis, petit à petit, le matin on enfilait une fringue supplémentaire sur le dos. Avec un lien direct entre les sacoches qui se vident et nous qui prenons du volume. En matière d’habillement, on adoptait sournoisement la politique de l’oignon en quelques sortes.
Car l’altiplano, c’est un vrai désert d’altitude. (Maintenant je me rappelle de mes cours de géo au lycée !). Et les hauts plateaux Andins, nous sommes en plein dedans. Aussi, une route normale évolue entre 3000 et 4000 m. C’est comme ça que, le plus simplement du monde, en suivant une belle pistes isolée, nous avons atteints 5000 m. Bon, quand je dis simplement, nous avons fini sur le second rapport à 27 km/h et les épingles négociées en première ! La pauvre moto qui arbore fièrement 25 cv en situation “normale”, se retrouvait particulièrement démunie dès que la bise fut venue…. A croire que ses canassons se sont débinés avec l’altitude !
Cela dit, il faut reconnaître que, d’un point théorique, par tranche de 1000 m on perd environ 10 % de puissance. Aussi, même moi qui suis particulièrement nul en maths, je peux comprendre qu’il ne reste pas grand chose en approchant du col. Comment dire ?… nous avions la sensation de rouler sur une mob fatiguée, redoutant le moment où il faudrait faire demi-tour ! Mais notre brave mob, essoufflée comme un asmathique en plein effort, s’est contentée de faire son boulot. A savoir, tracter son personnel et son équipage jusqu’au sommet ! Bien brave la petite 250.
De notre côté, c’était à peine mieux. En général, quand on fait une pause, on aime bien griller une clope en papotant et relaxant nos fesses par la même occasion. Or, bizarrement, à 5000 m on n’avait aucune envie de tabac. Encore plus bizarrement, on ne s’est pas raconté nos vies et les quelques pas pour immortaliser la scène nous ont suffit comme déplacement. En temps normal, la marche c’est un truc qui m’a toujours fait chier, alors là, mes dix pas ont largement rempli le quota avant emmerdement maximum.
Bref, nous sommes repartis. Un peu au radar, et un peu au ralenti dans nos tronches. Voilà encore un aspect que nous n’avions pas anticipé. L’altitude a manifestement un effet comparable à la plongée profonde. Mais si ! La narcose, la fameuse “ivresse des profondeurs”. Ce qui m’a fait regarder les “conquérants de l’inutile”, ces gars qui veulent escalader le toit du monde, sous un autre oeil… En fait ce sont des toxicos qui cherchent à se mettre la tête à l’envers !
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