Irkutsk airport.

  C’est ce que j’ai fait pendant tous ces kilomètres; asservi à mon autofiction, j’ai frénétiquement cherché du réseau dès que je posais mon vieux cheval. J’ai parfois oublié ceux qui étaient à côté de moi pour partir vite raconter ma vie à la machine en comptant sur elle pour transmettre à d’innombrables invisibles anonymes les instantanés qu’il m’aurait suffit de vivre. Je me suis encore une fois réfugié derrière l’anonymat des lecteurs lointains, pour échapper à la réalité  de l’instant car on sait tous qu’on a pas la place pour aimer tout le monde et que les voyages créent toujours  des handicapés du cœur ou des égoïstes fondamentaux. Le matin du dernier jour, comme prévu, il a neigé sur Irkustk, mais je le savais depuis longtemps qu’il était écrit quelque part qu’il me faudrait revenir pour rouler sur la neige et la glace…La moto a trouvé un abri dans un garage de périphérie, dans un endroit où il n’y a que des garages conteners, un gardien et un chien. Quand on a refermé la porte, j’ai eu le sentiment que, comme l’Arche d’Alliance à la fin des  Aventuriers de l’Arche Perdue, ma moto avait été archivée dans un endroit que je ne retrouverais jamais sans l’aide d’un guide averti. J’ai pris un bus le matin qui m’a emmené à l’aéroport  aux pistes enneigées d’où j’ai décollé pour clore ce chapitre  qui, du midi de la France, a quand même  réussi à m’emmener jusqu’en Sibérie…

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