Jeu de piste…

Je me suis repris la piaule  avec la vue sur le lac, pas loin du débarcadère en chantier. En déchargeant mon paquetage, j’ai dû me rendre à l’évidence, j’avais perdu un ski ; les vibrations avaient fait sauter sa vis de fixation. Le lendemain matin, il fallait tenter de le retrouver. Il devait être quelque part au milieu de la piste. Il y a peu de circulation ; vraiment, sur le coup, cette tentative ne me parut pas irréalisable. Une vingtaine de kilomètres à fouiller minutieusement, je ne suis pas aux pièces, je tente le coup. Dans le premier sens, je vérifie le milieu de la large piste de terre ; le pourcentage de chance de le récupérer là me semble devoir plafonner au maximum de sa cote. Un objet long et plat de quelques kilos qui tombe d’une porte bagage sur une piste caillouteuse, se doit de s’échouer là, juste où il touche le sol, sans rouler à perpette. J’arrive finalement là où nous avons tous débarqué la veille, je n’ai rien trouvé. Il me reste à faire le chemin inverse, je serai sur la droite, je scruterai le fossé…mais je commence à douter. Rien non plus ; quelqu’un a dû le récupérer, en faire une pioche pour casser la glace, une pelle à pizza ou une raquette de tambourin… A trente à l’heure, sur le roulis des cailloux du bas côté, je roule les yeux rivés sur le fossé…toujours rien . Finalement, dans une côte escarpée de taule ondulée bien marquée, je le vois en plein milieu du virage, pas loin  des totems chamaniques mais ça n’a sûrement rien à voir. Comment ne l’avais-je pas vu à l’aller ? J’ai dû presque lui rouler dessus. J’aurais cru n’avoir pas laissé passer  de mon crible un seul centimètre de route. Mais c’est ça de croire, on s’illusionne. On s’obstine à voir des choses qui n’existent pas et ne pas voir celles qui sont là au milieu du chemin. C’est comme ça qu’on mène notre monde au chaos, à ne pas croire comme il le faudrait…J’aurais dû au moins laisser une bière au pied des totems, mais je suis reparti en ouvrant les gaz, pour un peu profiter de cette piste bondissante. Je suis rentré à Irkoutsk bien couvert parce qu’un petit vent tranchant comme un rasoir s’était levé pour me souhaiter un bon retour…

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