La route du lendemain quitte la zone forestière pour s’égarer dans une infinie morne plaine marécageuse toute grise. Les stations services y sont rares, les bistrots de bord de route aussi et il fait toujours frais. Les feuilles, pourtant, réapparaissent sur les arbres qui reverdissent, on pourrait croire à un paradoxe temporel ; je ferais marche arrière, remonterais vers l’été. C’est plutôt la route qui redescend vers le sud. Après une large courbe au nord pour contourner la Mandchourie chinoise, la route de Vladivostok plonge plein sud, ça se voit un peu, ça ne se sent pas du tout. Il y a de la neige dans les fossés et si j’en crois le cycliste Moscovite que je croiserai au triste motel de l’étape, j’ai dû avoir une sacrée chance. Le jour où, avec Piotr, on se tapait une journée de pluie dégueulasse, lui, pas bien loin, sur la même route, il avait de la poudreuse jusqu’aux chevilles. J’ai emmené mes chaines à neige, c’est vrai, je ne crains rien, mais la simple idée de devoir les chausser au bord de la route ne m’enchante pas du tout et finalement, n’en déplaise aux lecteurs qui voudraient plus d’action, avoir fait presque tout ce voyage au sec, c’est un luxe que je regretterai jamais.
Priviète Ptiliouk,
tu ne dois pas être loin du Birobidjan… je me souviens qu’en 1993, les panneaux étaient encore écrits en Yiddish.
Bonne route,
Paka,
Komar