Ce jour-là, après une fraîche étape neigeuse, quelque part entre la Turquie et l’Iran, le héros de la route m’avait raconté l’infinie frustration qu’il avait ressentie quand, lors de son tour du Monde, il n’avait pas pu remonter les steppes Sibériennes pour arriver au Détroit de Bering. Il avait cru qu’il fallait s’y lancer au début de l’été. Personne ne l’avait prévenu qu’à cette époque, les pistes de Yakoutie n’étaient que de gigantesques bourbiers et c’est seulement sur place que des spécialistes autochtones lui avaient expliqué que la seule période où il était possible de se déplacer là-bas, c’était quand la glace pouvait supporter le poids des camions. Complètement dépité par cette information qui lui prescrivait quelques mois d’attente à Magadan avant de reprendre la route, il avait chargé sa moto dans un avion se consolant en inaugurant la première ligne aérienne Magadan-Anchorage, symbole de l’ouverture Est-Ouest… Nous étions en 1991, deux ans seulement après l’effondrement de l’Empire Soviétique.