La grande ville suivante s’appelle Omsk. Je m’y égare un peu en arrivant. Ici, il n’a pas plu et les arbres sont encore presque verts, je n’y comprends plus rien aux saisons, mais je profite de ce providentiel retour du temps sec pour rentrer dans les bouchons de la ville en slalomant partout, des accotements défoncés, aux milieux de grandes avenues, quand le pneu adhère à la route, on retrouve cette liberté de mouvement incomparable. Je m’égare dans des périphéries informes, des bouts de villages en bois, mêlés aux friches industrielles, aux terrains vagues et aux immeubles neufs. Ici l’urbanisme commence à faire un peu n’importe quoi et je profite de mon carnet d’adresse pour me perdre avec délectation. Je sais qu’à un moment donné, je m’arrêterai près d’un panneau de rue, j’appellerai mon relais motard et quelqu’un viendra me chercher. C’est exactement ce qui se passe…dix minutes après le coup de fil, une berline BMW aux vitres fumées rapplique, je me fais tout un cinoche, genre mafia russe qui va m’emmener dans les lieux interlopes de la ville… mais non, elle m’abandonne très vite sur une place avec buvette ou quelques motards prennent le relais…Ils m’emmènent à leur local, rentrent ma bécane dedans, me montrent le canapé où je pourrai dormir, entre les outils, les casques, le bar et les bécanes…Puis on repart en bagnole bouffer des pâtes dans un resto au bord du fleuve, du grand fleuve, on est en Russie, les fleuves sont toujours grands. Ensuite on va chercher de la bière dans un magasin spécial où il y a quelques dizaines de pompes qui sortent du mur, on te remplit des bidons plastocs de un ou deux litres avec la bière de ton choix et tu repars avec dans ta bagnole. Il y a Sergueï, préparateur moto qui veut aller s’installer aux bords de la mer noire, là où il n’y a pas d’hiver et puis son pote à la tronche de Bruce Willis, qui, accroché à son téléphone, ne quitte jamais sa Suzuki Hayabusa et sa combi de cuir, l’une comme l’autre sont maculées de moustiques écrasés. Après être repassés sur la place avec buvette du début où se fête l’anniversaire d’une bikeuse du coin, on repart au local finir la soirée…La bière ça fait moins de dégât que la vodka, je vais écrire tranquillement mon billet du jour avant de m’endormir…