départ en vrai et considérations diverses…

Le matin, il a donc fallu aller au pays des garages puisque c’est de là que devait être donné le départ. Alexey avait prévu de m’accompagner les cinquante premiers kilomètres tant il aime entendre vrombir ses cylindres. J’ai rassemblé mes affaires ; c’est compliqué de rassembler ses affaires quand il y en a une partie au garage et une autre à l’appartement. Déjà au départ de France et sachant  que j’avais laissé une partie en Sibérie, une certaine prise de risque s’installait, mais je continue à faire confiance au système de la liste, le tout étant de ne pas la perdre, la liste.   Nous sommes donc partis par une route sinueuse et large au milieu  de grandes collines boisées, un paysage comme on en trouve de l’Est de la France , jusqu’à la Sibérie en passant par toute l’Europe centrale qui, à l’exception de la plaine du Danube, n’est quand même composée que de collines boisées. On s’est fait un petit resto de bord de route, Alexey, moi et un pote à lui, un ado bizarre qui avait l’air d’avoir dix ans mais avec une grosse voix, un rescapé de Tchernobyl peut-être…Quand on s’est quittés, j’ai voulu mettre les boules Quiès, arme fatale contre les sifflements pour les longues étapes… mais je ne les ai pas retrouvées. Oh, putain, que j’avais la rage ; ce matin, je les ai bien sorties du paquetage, mises en évidence, sachant que j’allais en avoir un besoin indispensable, mais bon, qu’en ai-je fait ? Où les ai-je donc déposées en partant ? Comment ont-elles échappé à mes quarante mille checkups !? T’en veux une autre ? Où sont passés mes gants ? Mes super gants « super-grand-froid », filés par Furrygan  en avril pour les tester sur le Baïkal ! Quand j’ai fait mon sac, chez moi, avant de partir, je n’ai pas trouvé les gants…normal, j’avais dû les laisser à Irkutsk en avril, puisque de mai à août, il n’y avait vraiment aucune raison pour que j’en ai besoin dans le midi de la France…et bien, ce matin, dans le garage, il y avait bien ma tente, mon duvet, ma combi, mon casque, mes skis en fer mais pas de gants…je devrais me recouvrir le corps de post’it, de la tête au pieds, dans les chaussettes, dans le slip, je devrais en manger pour en avoir même dedans, mais je suis certain que je continuerais quand même à oublier des trucs aux quatre coins de la planète…                                                                      J’ai repris la route avec le casque qui siffle et les petits gants d’été. Après une petite chaine de montagne, on redescend sur les rives sud du Baïkal. Il y a là quelques  bourgades  anonymes, un petit port avec deux vieilles grues et des entrepôts et puis la route remonte vers d’autres collines embrumées. Une odeur bizarre flotte dans l’air, je sais que je la connais, je n’arrive pas à l’identifier…ce n’est pas une odeur mécanique, ni végétale, c’est quelque-chose d’autre. Je cherche dans les souvenirs, les odeurs sont souvent liées aux souvenirs ; ça y’est, ça me revient, c’est l’odeur de la cendre froide. Cette brume étrange, qui donne au paysage des airs crépusculaires, ce sont les fumées des incendies qui ravagent la forêt deux cent kilomètres plus haut. J’ai fini par m’arrêter dans un champ, à la lisière d’une forêt de bouleaux… ça sent toujours, on s’habitue, c’est quand même pas une odeur d’égout.       On m’avait beaucoup parlé des moustiques de Sibérie, j’ai tout entendu à leur propos, qu’ils étaient énormes et sanguinaires…je n’irai pas jusque là, mais il faut bien reconnaître qu’ils ne manquent pas d’assiduité…Je n’ai pas regretté d’avoir emmené mon chesh de touareg, c’est beaucoup plus pratique qu’une chapka. Dans la nuit, j’entends bien les chiens qui aboient, au loin, quand passent les interminables trains de marchandises…demain, il faut absolument trouver des gants et des boules Quiès soviétiques…

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