Attente encore

Depuis mon arrivée, le ciel est toujours bleu et, à l’abri du vent, un tout petit air de printemps se fait sentir. Je pourrais presque sortir la moto ; une fois franchis les cinquante mètres verglacés, si on reste sur les axes principaux, tout est parfaitement dégagé. Il faudrait inventer des chaines à neiges qui se montent et se démontent en quelques minutes, j’ai quelques idées qui me trottent dans la tête, j’ai du temps pour les idées… mais c’est ce qu’on appelle un marché de niche et je doute que lancer une étude soit une affaire très rentable ; il n’y a quand même que deux français qui sont montés là haut en quinze ans et en plus, c’était en été sur des péniches. Comme créneau marketing, il me reste les fêlés des « hivernales », ces réunions de motards qui, une fois pas an, se réunissent sur un plateau enneigé pour vider quelques caisses de bière… je vais creuser mon idée, j’ai le temps, j’attends…J’ai voulu venir jusqu’ici et même au delà, il faut que j’accepte le temps mort. Les attentes interminables font souvent partie intégrante et sont le charme caché des voyages désorganisés, car c’est toujours là que se forgent les rencontres moins éphémères, que s’esquissent des amitiés qu’on pourrait croire éternelles.

Comme à chaque fois, je m’organise une petite routine. Après avoir écrit et dessiné au petit matin, je pars une fois encore repenser mon paquetage dans le garage chauffé pour être prêt à bondir quand le signal viendra. Je règle une fois de plus mon ralenti, parce-que, malgré les câbles neufs, il est toujours un peu élevé…je déambule… l’après midi, je gribouille encore un peu dans la cuisine de l’hôtel puis je vais rendre visite à Evgeniy qui me fait le compte rendu des dernières recherches de camion pour emmener la moto vers le nord. Il me dit qu’à force, tous les camionneurs de Magadan vont être au courant. Il y en a bien un qui aura une petite place pour une vieille bécane et son chenu pilote qui ne prendra presque pas de place dans la cabine, qui se fera tout petit, se glissera dans la boite à gants s’il le faut…

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