Futur hypothétique


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Nous voici donc, coincés dans nos confinements respectifs, à pouvoir prendre le temps de réfléchir. Du fond de nos appartements, ou du haut de nos arbres, nous pouvons nous  demander de quoi ce chamboulement inattendu accouchera quand la page se tournera.

La mesure, proposée par un ministre néolibéral, de redistribution des dividendes, même soumise à d’innombrables conditions, a de quoi surprendre . Elle pourrait-être un premier pas vers autre chose. Car quand le petit virus s’active, les spéculations informatisées continuent de tourner. Du temps où la bourse se faisait à la criée, les postillons s’envolaient et retombaient en pluie acide sur les spéculateurs en tous genre. En des temps pas si anciens, une épidémie aurait contaminé en une seule séance de clôture tout ce microcosme vicié et la bourse se serait arrêtée. Mais tout a été informatisé, la corbeille hurlante appartient à l’Histoire et, à la microseconde près, toutes les opérations se font automatiquement et les traders ont depuis longtemps pris l’habitude de travailler chez eux. La plupart d’entre nous qui découvrons le boulot à domicile, ignorons que les grands mouvements financiers, qui font et défont le monde du travail, s’exécutent, eux aussi, à la maison, dans le salon ou au plumard.

 Evidemment, de confinement en confinement, ça devient difficile de savoir ce qui se trame chez les confinés privilégiés qui gardent les manettes… ils sont au courant, ces confinés-là, ils savent qu’il faut acheter des actions chez les fabricants de masques ou de papier chiotte, ils savent que, quelles que soient les guerres et les débâcles, il y a des valeurs  nouvelles… et d’autres éternellement stables depuis que les hommes ont arrêté de chier dans l’humus des clairières …

Passé décomposé


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Les vieux tombent comme des mouches, mais loin des statistiques quotidiennes.

Ils sont comme ça les vieux, ils ne veulent pas déranger, tellement mis à l’écart qu’ils ne font même pas partie du comptage officiel, mais on les appelle les séniors parce que ça fait plus propre.  Quand un vieux meurt, on ne peut plus l’enterrer en famille à cause du confinement. En même temps, les familles, finalement, comme elles les occultent de plus en plus, les vieux, peut-être que ça les arrange de ne plus avoir à gérer un enterrement de famille, ça fait des économies ; en temps de crise, ça fait du bien, sauf pour les maisons de retraite, qui doivent commencer à flipper de voir disparaître la matière première d’un bizness si lucratif. Les directeurs de groupes de maison de retraites doivent flipper terriblement; non seulement le filon s’épuise, mais ils vont devoir investir pour protéger leur personnel encore plus oublié que les caissières et les infirmières. Dans le peu de conscience qu’il leur reste, ils doivent culpabiliser, les vieux, de provoquer tout ce bordel. Ils voudraient juste, comme un grand chef Sioux, aller sur une colline, regarder au loin et attendre que la mort , sans déranger, les emporte sur la terre des ancêtres.

Les vieux, on les appelle aussi « nos anciens », c’est encore plus chic… sans doute parce qu’il y a un adjectif possessif de proximité affective ; on les rapproche pour encore plus les éloigner.

Je sens bien du haut de mon arbre que je serai bientôt un vieux, mais je ne vois pas la mort poindre, là bas, à l’horizon. Quand elle arrivera, je veux bien qu’on me laisse pourrir sur une décharge, dévoré par mes frères les rats, je veux bien devenir du compost ou de la bouffe pour chien, économiser des larmes et du bois d’arbre. Mais j’ai encore une moto à récupérer, là bas, dans le grand Est Sibérien, je vais donc essayer de tenir jusqu’à cet automne pour retourner sur le cercle polaire, c’est la plus belle saison… en espérant que la route sera ouverte…

Présent différé


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Il n’y a plus d’heure et pourtant cette nuit on en a pris une de plus… jamais changement d’heure n’a paru aussi dérisoire quand, depuis quinze jours, on vit confiné dans une autre dimension. Heure d’été ou heure d’hiver, encore des valeurs du temps passé.

La polémique annuelle n’aura pas lieu, d’autres choses occupent les esprits et qu’importe de gagner ou perdre une heure pendant la sortie du samedi soir, puisqu’il n’y a plus de sortie du samedi soir. Qu’importe de se dire qu’on  a gagné une heure de jour pour se balader après le boulot puisqu’on ne bosse plus et on ne se balade plus… et encore moins de regretter de devoir, dès que le réveil sonne, se lever dans l’obscurité alors que le jour était revenu; Maintenant, les réveils sont remisés au  placard et on dort tant qu’on peut sans soucis de l’heure puisque les repères ont disparu…

Temporalité suspendue…


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Il n’y a plus d’heure… il n’y a plus de réveil ni de weekend, l’heure de l’apéro a disparu, l’heure des braves est à l’hôpital. Nous sommes tous comme ces spéléologues coincés des semaines durant au fond d’un gouffre et qui perdent toute notion du temps. Il y a bien encore des jours et des nuits, mais on y fait à peine attention, nous sommes tous en train de glisser vers l’intemporalité. Quand je veux m’isoler dans mon isolement, je prends de l’altitude, je monte élaguer la cime des arbres… de là haut, je peux voir un peu plus loin, l’horizon prend de l’ampleur, je regarde passer les oiseaux…

La frondaison du pin ne fait pas dans la luxuriance, pourtant, malgré tout, comme un petit garçon dans sa cabane, je m’y sens bien caché et ça fait du bien…

Relativisme urbain


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Dans les villes, comme il n’y a pas d’endroit où planter des patates ni de grands pins à élaguer, on continue à s’organiser comme on peut. On s’adapte ; La vie en communauté en gardant ses distances, c’est le principal paradoxe de confinement. Le principe paradoxal pourrait-on dire, pour faire plus chic avec les mêmes mots.

Ceux qui mangent devant la télé commencent à avoir du surpoids prononcé et des angoisses notables à l’idée de ne plus avoir de piles dans la zapette. Ceux qui font de la musique commencent à se faire des ennemis chez les voisins, voire dans la chambre d’à côté, quant à ceux qui font chauffer les bigdatas en restant connectés toutes la journée, ils ne devraient pas tarder à contracter des inflammations oculaires inquiétantes.

Le printemps est frisquet et les terrasses chauffées au gaz sont vides… encore quelques broutilles à rajouter au discours de remerciement climatique que nous pourrons faire au virus quand il aura eu, malgré tout, le bon goût de partir en vacances !

( un somptueux petit film suisse en Bonus:                               https://www.youtube.com/watch?v=ihWkiE1FBbQ   )

Substantif presque parfait


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Je commence à m’emmerder à jouer avec les déclinaisons des conjugaisons, c’est un passe temps comme un autre. En ces temps insolites, on a besoin de passe-temps… Le substantif du jour c’est le « virus ». En dix jours, le virus a réussi l’impossible pari de la décroissance accélérée. Mais le virus est aussi notre ennemi car il veut notre peau ; va t’on réussir à signer un armistice avec ce petit organisme décérébré ? Il nous propose sans fioriture une décroissance forcée de notre démographie. Beaucoup en parlaient depuis longtemps comme un passage inévitable pour sauver l’humanité, mais en imaginant, bien évidemment, que ça ne concernerait que les autres.  Les autres pensent sans doute aussi la même chose. La maladie est une loterie… mais caissières et infirmières n’ont visiblement pas tiré le bon numéro… Les caissières sont les poilus de cette nouvelle sorte de guerre. On les envoie au front pour sauver l’économie. Quand les caissières et les infirmières occupaient les ronds points en gilet jaune, on les trouvait bien sympathiques mais un peu chiantes quand même, bloqués qu’on était dans nos bagnoles. Aujourd’hui, les bagnoles sont au garage et les autres sont au front. Certains préparent sans doute déjà les monuments qu’on érigera à leur gloire quand la guerre sera finie…

Conditionnel plus que parfait


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Dix jours, ou neuf, les repères temporels s’estompent au fur et à mesure que le printemps refleurit. Une semaine et demi, c’est absolument incroyable qu’en si peu de temps, les poissons reviennent à Venise, la bourse s’effondre, les paysans demandent aux gens  de revenir aux champs et  un ministre, à la grande distribution, de se fournir chez eux ; tout ce à quoi on ne croyait plus…    le retour à la terre…

Et si on mettait l’armée aux champs? Ce serait pas mal puisque c’est la gueeerre….  Il suffirait qu’après le passage épidémique, on décrète une semaine et demi de pause mensuelle et on aura réussi l’impossible ; tout se portera à merveille, sauf la bourse, mais on l’emmerde !

Présent supsensif et futur proche…


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Après une semaine à la maison, beaucoup se demandent ce que ça donnera quand il faudra y rester un mois.  Une semaine… en ces quelques jours, l’inversion de la courbe du  gaspillage énergétique espérée par tant de climatologues pourrait déjà avoir été amorcée. On se disait que ça prendrait dix ans, vingt ans ou plus peut être. En une semaine une minuscule particule d’ADN dans une petite coque lipidique a changé toutes les prévisions… Reste à savoir si dans quatre ou cinq semaines d’apprentissage, on se jettera à nouveau dans les embouteillages au volant de quat’quats au gasoil pour aller se cramer la couenne sur des plages ou si on prendra la peine de terminer les bouquins qu’on aura commencé…

Passé simple…La visite de la famille Yakoute


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Quelques jours avant mon départ, qui est devenu en fait, quelques jours avant mon  introspectif départ vers chez moi, j’avais reçu la visite de Kyrill. Je ne savais pas encore que je ne pourrais pas partir en Sibérie, mais  là, c’est la Sibérie qui venait à moi.

Kyrill, c’est le chef des loups gris, le club de motards de Yakutsk, qui m’avait recueilli, il y a deux ans, avec ma cheville pétée. Cette année, il avait décidé de faire un tour d’Europe en famille et en bagnole. Parti de la Yakoutie enneigée il y a un mois et demi avec son fils de six ans, il avait, après huit mille cinq cent bornes, rejoint le reste de sa famille à Moscou . Avec Madame, le second de trois ans et le petit dernier de quelques mois, les voilà partis pour un tour d’Europe. Ils ont donc tous débarqués chez moi en prévenant la veille.

Je les ai reçu un peu en catastrophe parce que ,le lendemain matin, il fallait que je parte au salon du livre de Bruxelles… époque lointaine où on traversait les continents, insouciants, alors que maintenant on aurait presque peur d’aller au bout de la rue.  On a  bu un peu, comme le veut la tradition… enfin surtout monsieur, parce que madame, elle doit s’occuper de la horde de petit Yakoutes ; ça aussi c’est la tradition…

Je leur ai laissé la maison jusqu’au lendemain pour qu’ils se reposent un peu avant de traverser l’Espagne avec leur gros Toyota.  C’est la moindre des choses, il m’avait quand même laissé son local de motard avec le chauffage et le bac à chat pour chier.

Quelques jours plus tard, alors que j’étais rentré de Bruxelles, ils sont repassés. Ils avaient appris à Valencia que l’Italie venait de fermer ses portes, ce qui compliquait énormément leur retour. Craignant d’autres confinements, ils avaient préféré rebrousser chemin. Alors que j’apprenais que je ne pourrais pas partir plus loin que mon paillasson et ma boite au lettres, Kyrill faisait des ronds dans toute l’Europe en cherchant la porte de sortie.

Ils ont fini par abandonner la grosse bagnole en Hongrie pour reprendre en catastrophe un avion pour Moscou avant que toutes les frontières ne se ferment.

On vit vraiment une époque formidable…

Conditionnel de weekend


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Les confinés regardent compulsivement des séries en streaming. Les télétravailleurs ont sans doute visiopapoté durant des plombes, ça remplace les ragots près de la machine à café ; il faut bien s’occuper.

 Pendant que les bagnoles, confinées elles aussi, laissent un peu respirer les bords de route, je me demande parfois si les data-centers, eux, ne  seraient  pas en hyper-surchauffe. Un Moteur je sais comment ça marche, carbu, piston, soupapes, cylindre qui chauffe un peu, pot d’échappement qui chauffe à mort. Je viens encore, par déontologie journalistique de le tester récemment ; mais là n’est pas le débat…  en data-center, franchement , j’y connais que dalle. Faut-il une centrale nucléaire pour permettre des millions de millions de téléchargements ou de streamings  ou juste quelques panneaux solaires, une éolienne, un pédalo ? On s’en pose des questions, en confinement … en attendant, on peut toujours chercher des tutos pour fabriquer des masques lavables avec des vieux slips recyclés ; voilà une chouette idée pour un weekend en famille !

Impératif simple


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Reste chez toi, citoyen, pour la santé de l’Humanité , c’est un ordre .

Reste prostré devant des jeux vidéos qui vont te plomber la tronche à coup de guns virtuels et des réseaux asociaux qui vont te bourrer le mou à coup de bouillie pseudojournalistique.

De quel complot sommes nous les victimes? Une vengeance divine ? Un président qui veut faire une pause dans les réformes, repousser des élections et se trouver une nouvelle posture ? Un autre président au brushing douteux, plus à l’Ouest, qui veut marginaliser l’Europe ? Un autre à l’Est, au lifting tout aussi douteux  rêvant de redonner la place de géant terrifiant qu’avait son pays il y a cinquante ans ? Un laboratoire chinois spécialisé en recherche sur les armes bactériologiques, justement basé à l’épicentre de la pandémie, qui aurait eu des fuites ? Les micro-organismes qui, en réalité, dirigent tout le vivant, de nos humeurs à la vie des grandes forêts et qui voudraient nous filer une leçon? C’est ça le truc ; les micro-organismes en avait marre des excès du singe nu, alors ils ont fabriqué un super soldat pour ralentir son emprise sur le reste du vivant!Moi je fais partie des singes nus. Cette semaine j’aurais dû avoir pris quelques avions pour aller de l’autre côté de la planète, remettre ma bécane en service, la charger dans un camion jusqu’à Bilibino, puis rouler jusqu’à Anadyr. Kérosène, gasoil, essence… Avec l’ordre de confinement, je coupe du bois, lis des bouquins, élague des arbres et plante des patates.La courbe de mon bilan carbone a amorcé une belle décroissance. Quand je regarde mes bécanes immobilisées dans le garage, j’ai presque l’impression de rêver à une époque lointaine où il suffisait d’appuyer sur le démarreur pour partir n’importe où…mais l’époque a changé, je n’ai plus qu’à obéir à  l’impératif du jour.

Reste chez toi, citoyen, pour la santé de la Planète, c’est un conseil d’ami !

Présent imparfait…


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La revanche de la nature, c’est une idée dans l’air du temps, surtout quand on ne peut même pas le prendre, l’air, confinés qu’on est tous dans nos apparts ou nos maisons…Il paraît qu’aux quatre coins du globe, des animaux reviennent dans les villes pour se nourrir.    C’est le monde à l’envers…  Hérissons et  crapauds vont pouvoir faire la sieste au milieu des départementales. Chevreuils et lapins brouter les ronds points libérés par les gilets jaunes confinés . Dans les arbres des grands boulevards, quelques bestioles doivent se demander pourquoi, cette fois, c’est l’espèce humaine qui est enfermée…

Impératif plus que parfait


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C’est toujours bien d’avoir un docteur comme correspondant.  Il m’explique les mesures prises dans son pays… ce sont à peu près les mêmes qu’en France une semaine plus tôt, quand, malgré les troquets et les cinoches fermés, on continuait à se la couler douce.

Les mesures prises par le maire de Moscou se sont rapidement étendues à tout le pays et les frontières des régions se sont toutes fermées aux voyageurs étrangers. Finalement, entre une quarantaine là bas et un confinement ici, quelle serait l’option la plus grisante ?

Le docteur m’envoie une image de sa dernière virée à la campagne…ça fait rêver…

Pendant qu’en France, les gens confinés voient jaillir de partout un printemps plein d’insolence, un printemps qui leur crie qu’enfin tout va bien pour toute la nature… une nature qui leur balance que c’est tellement bien quand ils arrêtent leurs usines, leurs bagnoles ou leurs avions ; les bourgeons éclosent, les insectes papillonnent …les virus ont dû être missionnés par la nature pour qu’on arrête de se prendre pour les maîtres du monde. Y sont tout p’tits ces cons-là, mais ils ont sacrément bien réussi leur coup…

L’imparfait de l’impératif


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Je ne suis donc pas parti… quand l’apocalypse frappe à la porte de toutes les frontières, on ne la ramène pas trop ; on fait le modeste.   Pourtant l’apocalypse avait été cool, elle m’avait envoyé des messages sous forme de petites apocalypses ménagères genre fuites d’eau ou canalisations bouchées, ces petits contretemps qui, l’avant veille d’un départ, s’appliquent à mettre les nerfs à l’épreuve. C’est toujours bon un petit examen du self contrôle avant une expédition lointaine.

Comme il fallait corser un peu, alors que je m’appliquais à préparer mon potager avant de faire mon sac, le motoculteur, a buté contre un caillou et en essayant de le retenir j’ai carbonisé ma main sur le pot d’échappement,  puis, en  ramenant l’engin au garage,  assurant moyennement à maintenir la bête de ma main meurtrie , j’ai percuté le pneu du camion d’un copain qui n’a pas survécu à l’impact… le pneu pas le copain… quoique…Quand il est passé quelques heures plus tard avec une roue de secours et un gros cric, il s’est malencontreusement foutu le doigt entre le cric et le camion ; il a pas aimé le doigt, il est sorti tout plat et on a fini aux urgences.C’est pas des signes tout ça, peut-être ?

Le conditionnel


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Je devais donc repartir à Omolon… Tout semblait s’agencer remarquablement…

Le docteur d’Omolon s’était occupé des formalités du Propusk, ce fameux laisser passer délivré par les autorités du Tchoukotka pour avoir le droit de traverser ce territoire autonome. Il avait organisé mon accueil par un collègue à lui à l’hôpital d’Omolon et le transport de la la moto jusqu’à Bilibino, la ville à partir de laquelle les routes sont, parait-il, vaguement plus carrossables. Mon Docteur Sergeï m’aurait attendu à Bilibino où il vient d’être temporairement  nommé . Tout ça s’agençait tellement bien qu’on aurait presque cru à un voyage organisé.

Mon départ était programmé pour ce jour fatidique où la France s’est refermée sur elle même. Quel hasard étrange…

Encore deux jours avant, je préparais mon paquetage, j’inventoriais  insouciant les derniers détails, les petites choses à ne pas oublier, j’étais encore dans l’excitation du départ.

Il était difficile d’échapper aux rumeurs de pandémie, mais le Tchoukotka, là-bas, de l’autre côté de la planète, semblait si loin de tout ça. J’étais sûr d’y trouver cette sérénité  dans laquelle le voyageur solitaire retrouve toujours cette délectable sensation de plénitude.     Je vais devoir tenter de retrouver cette plénitude en restant chez moi.J’ai de la chance ; par la fenêtre la vue est belle, les cerisiers fleurissent et bourdons et abeilles s’y affairent. Elles s’en foutent, les abeilles, de ce virus à nom de bière sucrée, elles ont leurs bestioles virales à elles qui ne sont pas très sympathiques non plus et il y a bien longtemps qu’elles ont appris le confinement…A cette heure précise, j’aurais dû être en train d’attendre mon embarquement pour Magadan ; on ne fait pas toujours ce qu’on veut…