Voir la carte de notre itinéraire : https://goo.gl/maps/djGZZurCJL22
18h30 – Une pluie froide sur une piste boueuse nous accompagne. Le soleil baisse rapidement et le froid devient mordant.
Michel dit à travers son communicateur : « J’ai froid ! »
– Qu’est-ce qui se passe ? demande Max.
– Je suis fatigué, j’ai froid. Toujours pas de goudron, que cette piste boueuse et casse-gueule. Arrêtons-nous dès que possible.
– Plus que 75 km avant notre prochain arrêt. Dis-je.
– Je ne me sens pas de les faire. En plus, on ne sait pas ce qu’on va trouver sur la route.
C’est un « Ok » général qui résonne dans tous les communicateurs avec la consigne : Trouvons un gîte !
10 km plus tard, dégoulinant et gelés jusqu’aux os, nous croisons notre première yourte (habitat traditionnel mongole) et nos premiers Yaks.
Enfin, apparaît sur le bord de la piste, un hameau surgit de nulle part avec peint en grosses lettres sur une de ses façades, ces mots magiques : « SHOP – CAFE – HOTEL ».
Un jeune couple de Mongole accueillant et chaleureux nous loue deux petites chambres.
Nous passons notre première nuit dans un lieu typique complètement dépaysant.
Imaginez un grand cube divisé en deux. Une moitié pour la grande chambre.
La deuxième moitié divisée encore en deux : Une pour le vestibule et l’autre pour une petite chambre.
Ici, pas de carrelage, pas de parquet, brut de chez brut, simplement du lino posé sur la terre battue et des murs blanchis.
Chaque chambre est équipée d’un poêle fonctionnant à la bouse de Yak séchée.
Le lit est en fait une grande planche de la largeur de la chambre recouverte de couvertures, de coussins et de couettes.
Un petit fenestron et une ampoule pendante au bout d’un fil courant le long du mur tentent d’éclairer la chambre. Deux prises électriques vétustes sont accrochée sur l’autre mur.
Shirarbek, notre gentil hôte, plante des clous dans la poutre pour faire sécher notre équipement. Une ficelle servira de corde à linge.
Les chambres sont froides et humides. Shirarbek revient les bras chargés de bouse de Yak, s’accroupit devant le poêle, ouvre le foyer, le bourre à « ras la gueule » avec ce combustible inattendu.
Quelques feuilles de papier journal roulées en boules, le tout arrosé généreusement d’huile de vidange. « CRAC » une allumette, « WOUF ! », le tour est joué.
Le papier imbibé d’huile s’enflamme, dégageant une fumée envahissant le plafond de notre chambre. L’atmosphère devient rapidement irrespirable.
J’ouvre la porte et l’appel d’air généré accélère la combustion.
Dans un vrombissement de feu de l’enfer, notre poêle se met à rougir.
En quelques minutes la température est si élevée et tellement insupportable que nous sortons.
Etrangement, aucune odeur à part celle de l’huile. En revanche le feu s’arrête aussi soudainement qu’il a commencé. Au bout d’une demi-heure, il est éteint.
Malgré son dénuement et sa simplicité, jamais une chambre ne nous a parue aussi délicieuse.
Nous parquons nos motos dans l’arrière cour boueuse à côté de celle de notre hôte.
La plupart des mongoles se déplacent soit à cheval soit sur de petites motos. En général des 125 ou des 150 cm3 chinoises. Il n’y a pas de grosses cylindrées en Mongolie.
Plusieurs raisons à cela :
D’une part, il est beaucoup plus facile de se déplacer dans le désert sur une moto légère et maniable même à deux dessus que sur nos mastodontes chargés à 500 kg avec pilote et passagère. Nous en croiserons de nombreuses au cours de notre traversée du pays qui nous ferons bien souvent envie.
Les mongoles très agiles sur ce genre d’engin se jouent des pièges du désert et traversent les guets avec tout autant de facilité.
En revanche, leur équipement est bien sommaire et les chutes doivent-être malheureusement sévères…
D’autre part, le prix d’une grosse cylindrée est prohibitif.
Les motos parquées , nos bagages déchargés et rangés dans les chambres, la faim nous appelle.
C’est dans une petite salle où trônent deux tables, un banc et quelques chaises que nous allons découvrir l’art culinaire mongole autour d’une bière tiède.
Tileugul Abai notre hôtesse, derrière le comptoir, concocte un plat à base de pâtes, légumes et viande de mouton, le tout arrosé d’un délicieux bouillon pendant que Shirarbek son mari, nous montre ses trophées de chasse; en particulier un tête de mouton argali (gros mouflon sauvage) dont les cornes peuvent peser plus de 20 kg.
22 h – Epuisés par cette journée riche en émotion, l’équipe part se coucher.
Repos bien mérité, nous plongeons dans un demi sommeil blottis dans nos duvets.
Vers 23h30, après avoir rendu visites à nos quatre compères logeant à côté, notre porte s’ouvre.
Shirarbek entre dans notre chambre plongée dans l’obscurité et nous tire de notre sommeil.
Il « baragouine » quelque chose dans sa langue. A moitié endormi, je hoche la tête. Quelle erreur !
La cérémonie du poêle recommence, CRAC, WOUF ! L’enfer est de retour. J’allume la lumière, adieu le sommeil.
Le couple s’installe sur notre lit surpris de nous voir dans nos duvets.
Grâce aux smartphones et à l’aide des traducteurs, nous devisons sur la vie en Mongolie, la musique, la famille… Photos, Facebook, Deezer…
Surprenant, le monde reste connecté même au milieu d’un désert en altitude.
Vers 1h30 du matin, Shirarbek commence à s’endormir et cherche vainement une couverture pour se couvrir. Après avoir tourné, viré, il se lève pour finalement regagner son lit. Quelques minutes plus tard, il appelle sa femme.
Tileugul quitte notre lit à regret et rejoint son époux. Le poêle a rendu l’âme. De nouveau, le froid et l’humidité ont investi la chambre. Blottis dans nos duvets, nous nous laissons enfin emporter par le sommeil.
Sachez qu’en Mongolie, l’hospitalité est un devoir. Vous pouvez librement aller dormir dans une yourte mais la réciproque est vraie. Un mongole peut très bien venir dormir dans votre tente ou chambre.
L’attitude de notre jeune couple Mongole était donc tout à fait naturelle.
Mais surpris par nos duvets, pas de couvertures pour se glisser dessous, ils ont regagné leur chambre.
Ce premier contact nous a bouleversé face à un peuple si démuni et généreux. Si vous décider de rejoindre la Mongolie par Tashanta, n’hésitez pas, arrêtez-vous à Tsagaannuur chez Tileugul et Shirarbek. Une rencontre qui illuminera la suite de votre voyage.
La Mongolie (3 fois grand comme la France avec moins de 3 millions d’habitants dont le tiers vit dans la capitale Oulan-Bator) est un pays désert, froid en hiver (-40°C) et pauvre mais tellement riche en contacts humains, aux paysages inoubliables que vous y laisserez une partie de votre coeur.
Un choc culturel important qui nécessite une réelle ouverture d’esprit.