MUSEU DE LA MOTOCICLETA : Barcelone (1)


Hervé

Salut copain (et copine),

Bon, tu sais que j’adore voyager, des USA à Vierzon, donc pour rester dans la logique du mouvement il nous manque … Barcelone ! (si, si, logique te dis-je).

Et ne te plains pas j’aurais pu te convier ici aussi (j’y ai été, ça aurait été vache de t’y emmener je le reconnais) :

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(je me faisais une autre idée de la Route 66, j’ai été très déçu ce jour-là …).

Alors, Barcelone disions-nous ?

D’abord, il nous faut LA chanson  adéquat, souviens-toi, là où traine petit Joe d’après Jean-Patrick CAPDEVIELLE (toute notre adolescence boutonneuse) :

http://www.youtube.com/watch?v=ZHGmJz69j7s

Barcelone donc, cette semaine dernière … la Sagrada familia, l’Institut Miro, le Musée Picasso, la Rambla, le parc Guell, son circuit moto historique de Monjuïc et ces trois concess’ Harley official , …

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Un esprit affuté comme le tient se souvient que BCN signifie Barcelona …DSC_3805

… espace commercial totalement aseptisé comme la MoCo se plait à en reproduire à l’identique partout dans le monde.

Sans grand intérêt, sans aucune originalité (je suppose que la concess’ d’Oulan-Bator a exactement le même aspect), c’est un super marché de la frime chromé pour les ceusses qui n’en n’ont (des $ /€. … ce qui actuellement en Espagne frise l’exploit).

Ah si, tout d’même, à signaler, accolé à la concess’ l’Espacio, l’entrée du 99% Moto BAR (http://www.facebook.com/el.99.por.ciento), la cervesa à 2€ dans un cadre american diner

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Mais bon, ça aussi ça fini par sentir le réchauffé …  woui je sais, je suis extrêmement critique, mais aux prix que pratique HD j’ai le droit !

Non, question motocyclette, ça n’est pas ici que ça se joue quand on recherche l’émotion.

Or dans ce domaine-là, l’émotion, Barcelone a toujours une réponse adéquat et te sort de sa manche le MUSUE MOTO de BARCELONA

C’est à la Fundacion Privida Museo de la Moto « Mario Soler » que l’on doit ce musée (ainsi que celui de Bassella inauguré en 2002). Il a ouvert ses portes en novembre 2011 et se situe en plein centre de Barcelone, à 200m de la Rembla (métro Liceu) dans une improbable petite ruelle.

C’est simple, je suis tombé dessus par hasard … et comme le hasard fait en général bien les choses, il se trouve être l’un des plus beaux musées européens dédiés à la motocyclette (dans la ville revendiquant le plus grand nombre de deux-roues par habitant d’Europe).

Mario Soler (1907 – 1991)   est une petite légende dans le monde de la moto ancienne en Espagne.

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Il a passé sa vie à récupérer des pièces et restaurer des motos, ses fils ayant évidement attrapé le virus ont repris le flambeau …

Son « œuvre » est aujourd’hui magnifiée par ces deux musées absolument superbes.

Celui de Barcelone, assez petit finalement (avec une surface de 600m carrés) se trouve en plein centre de la ville dans l’ancien couvent Santo Felip Neri, lieux prestigieux, historique, que rien ne prédestinait au monde de la moto.

Le couvent

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Le site après restauration

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     Le site aménagé

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On peut s’étonner de la passion des Espagnols (à Barcelone mieux vaux parler de la passion Catalane) pour la motocyclette et la compétition mais ça serait oublier que ce pays a connu une grande Histoire avec l’industrie de la moto.

Bien évidement tu connais les trois grandes marques espagnoles emblématiques  (auxquelles il convient d’ajouter DERBI bien sûr).

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Mais savais-tu que la seule Catalogne revendique entre 1905 et 2010, 196 marques en relation avec la motocyclette.

Soit :

  • 88 marques motos de série,
  • 7 fabricants de moteurs,
  • 56 marques de motos de course,
  • 45 fabricants de protos et autres « marques singulières » comme ils disent ici.

Amazing ain’t it ??!!!!!!

L’entrée du musée donc, à moins d’avoir l’info parce que tu cherches justement à t’y rendre, tu ne peux la trouver que  … par hasard.

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Dans une ruelle (petite, oui je sais c’est un pléonasme mais quand tu peux pratiquement toucher les deux murs de ladite ruelle tu es autorisé à pléonasmer), tu peux même passer devant s’en t’en apercevoir si tu n’y prends garde.

Dans l’entrée deux magnifiques antic bikes.

Une NORTON des années trente et une superbe Harley Davidson 1927 de 350cc dans un état « sortie d’usine » (c’est d’ailleurs à l’image des quelques 80 motos exposées ici, j’ai rarement vu un tel niveau de qualité de restauration. Bluffant).

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C’est la seule HD du musée d’ailleurs qui est essentiellement consacré, pour ce qui est de l’exposition permanente, aux marques espagnoles (quelques anciennes italiennes et allemandes et 3 ou 4 japonaises hyper sport des années 80 ayant participées avec des pilotes nationaux aux 24h00 de Montjuc).

Justement l’exposition temporaire, quant à elle, est consacrée au 24h00 de Monjuïc :

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On peut voir à ce propos un petit film de 15mn vraiment sympa (course de fous dans les rues de la ville avec trottoirs sécurisés à la bonne vielle botte de paille des familles – au secours !!!!!!) .

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J’ai visité le musée en un peu moins de deux heures (oui, j’ai pris mon temps pied) et n’ai été « gêné » que par 4 autres visiteurs.

Bon bin, comme d’hab’ hein : la suite bientôt.

La bise.

L’Hervé, your Berrichon friend.

Le site del Museu : http://www.museumoto.com/es/

MOTARD en INDE


Hervé

Salut copain (et copine),

Nombre d’entre nous connaissent Jean-François ZOBRIST.

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Industriel atypique, consultant émérite, chantre de « L’entreprise libérée », croyant fervent en la bonté de l’homme. (dans le dernier ouvrage de I.Getzrian et M. Carney paru en février 2012, « Liberté et Cie, Quand la liberté des salariés fait le bonheur des entreprises » il est longuement évoqué ; et d’une manière générale sur l’internet en googlisant son nom).

Ce qu’un peu moins de gens savent, c’est que Jean-François est un good damn biker (un sacré motard), un bouffeur de bitume, un enrouleur de kilomètres.

Rien qu’en 2011 il a parcouru 35000km sur diverses motos dont … 2000km en Inde sur Royal Enfield (respect l’ancien).

J’ai la chance de connaître Jean-François et, il y a quelques temps alors que je lui avais adressé quelques photos de ma dernière sortie moto, il m’a fait l’immense plaisir de m’envoyer en retour un remarquable texte qu’il a rédigé suite à son périple en Inde.

Un pur moment de bonheur à lire avec délectation et qu’il m’a autorisé à diffuser.

Voici donc, par monsieur Jean-François Zorbrist, Motard éclairé, un :

PRÉCIS DE CODE DE LA ROUTE INDIEN, A USAGE DES « MOTOCYCLETTISTES »

ou

MANUEL DE SURVIE EN MILIEU D’AUTANT PLUS DANGEREUX QU’IL N’EST PAS HOSTILE, SOUVENT COURTOIS, VOIRE MEME LUDIQUE

Illustré de certains de ses propres daguerréotypes pris en situation et qui sera bien utile à tout motocycliste désireux d’aller rouler en Inde.

Bonne lecture, la bise.

L’Hervé, your Berrichon friend

Article 1

L’usage de l’avertisseur sonore est impératif

Article 2

Il est de coutume de rouler à GAUCHE sauf si :

a) l’état de la topographie,

b) l’état du revêtement de la chaussée,

c) l’état de la circulation,

imposent une autre solution :

1) rouler à droite,

2) rouler au milieu,

3) rouler dans le bas-côté,

4) rouler dans le bas-côté du bas-côté.

Article 3

Il n’y a pas d’article 3, ni 4, ni 5, ni….

Décrets d’application de l’article 1 :

Le SEUL cas où le conducteur est dispensé d’utiliser son avertisseur sonore est lorsqu’il a la certitude absolue d’être seul sur une voie de circulation déserte jusqu’à l’horizon (mais il est fortement recommandé de s’assurer de temps en temps que cet accessoire sécuritaire est toujours en état de fonctionner…).

Sinon, on se doit de klaxonner obligatoirement et impérativement dans TOUS les autres cas : dépassement, croisement, présence d’êtres vivants, mammifères bipèdes comme quadrupèdes à moins de 5 m de la chaussée, etc…

Concernant les mammifères il faut anticiper (anticiper = ante cepare = non pas penser avant mais prendre avant = prendre avant toute réaction potentielle du mammifère, la seule et unique décision qui assurera votre survie); anticiper donc les  réactions possibles des différentes espèces: chiens, chèvres, moutons, ânes, vaches, buffles, zébus, chameaux et  autres cochons, singes même, hommes et femmes enfin qui cheminent aux bords, sur, voire même au milieu de la chaussée.

Il est à noter que deux espèces sont particulièrement imprévisibles, l’espèce humaine et les camélidés : les camélidés car leur faciès hautain, orgueilleux, et méprisant ne laisse que peu paraître leurs intentions ; quant à l’espèce humaine, elle semble s’être moins bien adaptée que l’animal au comportement fantasque et plein de fantaisie du conducteur moyen indien, en tout cas moins bien que le chien, qui regarde systématiquement à droite puis à gauche avant de traverser, et est le seul à s’arrêter, parfois même reculer quand il vous voit, alors que tous les autres mammifères continuent leur petit bonhomme de chemin quoi que vous fassiez.

Ceci étant on voit beaucoup de cadavres du meilleur ami de l’homme le long des routes, car il aime à dormir sur le macadam chaud. L’indien respectueux de toutes les formes de vies fera tout pour l’éviter, mais quand on double en troisième position…!!!

On constate que très rapidement le motard moyen développe une hyper vision proche de celle de Superman.

En effet en quelques jours de pratique de conduite d’un autre type, son œil arrive à intégrer dans le même instant, la présence des trois vaches en bordure de route à droite, le touk-touk et le camion qui arrivent en face, la moto avec 4 passagers devant, qui zigzague légèrement parce que le conducteur téléphone (si, si c’est possible en Inde), la nature et l’état du bas-côté, ultime refuge, et le troupeau de chèvres qui s’ébat au loin sur ce même bas-côté !

Cas particulier où il est impératif de klaxonner : quand en ville ou dans un village, la circulation est totalement bloquée dans un enchevêtrement de bus, camions, tracteurs, charrettes attelées à la gent asinienne ou camélidée, motos, vélos et autres touk-touks, tous engins imbriqués les uns dans les autres dans tous les sens.

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Il est alors impératif de longuement user de son avertisseur sonore, cela ne sert strictement à rien, mais soulage et donne un caractère festif à l’événement.

L’usage de l’avertisseur sonore est d’ailleurs vivement recommandé par les routiers dont à peu près tous les camions arborent sur leur arrière la courtoise mention : « Please HORN », parfois le texte est plus impératif :  » Blow HORN ».

Nota bene : touk-touk ou rickshaw espèce de gros coléoptère à trois roues, mue par un moteur diesel. Généralement de livrée jaune et noire, souvent sur-décoré façon princesse Barbie, dont la capacité d’emport en passagers est inversement proportionnelle au tarif des musées : 5 roupies pour les indigènes et 100 roupies pour les touristes.

Le touk-touk a une capacité d’emport limitée à 2, grand maximum 3 après moultes discussions pour les touristes, et de 17 adultes plus quatre enfants pour les autochtones. (Si, si, on a maintes fois vérifié la chose !)

Dernier point : la notion de priorité n’existe pas en Inde, ni à droite, ni à gauche.

La priorité est à celui qui a le klaxon le plus puissant ! Ceci explique que parfois des mobylettes sont équipées d’un organe sonore plus puissant que celui d’un camion !

Décrets d’application de l’article deux :

Il n’est plus d’usage de rouler à gauche quand ne le permettent plus:

a) la topographie :

Il est courant que la chaussée indienne serve de dépôt de cailloux, gravats, ordures, de lieu de travail agraire, auquel cas on passe ou on peut.

En cas de coulée de boue, notamment sous les ponts, il convient de passer à l’endroit estimé le moins profond.

Quant aux flaques d’eau, il est vivement conseillé de ne jamais tenter de les traverser car elles sont parfois de profondeurs insondables, et le peuple raconte à la veillée des légendes de motard dont le corps même n’a jamais été retrouvé…

Les gendarmes couchés s’appellent, en Inde, les gendarmes à quatre pattes car ils font couramment 50 cm de haut ! Ils sont très nombreux et bien entendu non signalés; ils remplacent efficacement les panneaux de limitation de vitesse.

b) L’état du revêtement de la chaussée :

Dans ce grand pays tout est de dimensions extraordinaires !

Leurs trous dans la chaussée sont à nos nids de poule ce que le Taj Mahal est à nos pierres tombales, d’ailleurs ici on parle de nids d’autruche.

Dans un premier temps, vous pouvez vous amuser à slalomer entre les trous, tant que la chose est possible, mais si la partie droite de la chaussée est en meilleur état, vous pouvez parfaitement rouler à droite, sans oublier cependant que vous n’avez pas priorité.

Il conviendra donc quand un véhicule arrive en face de vous rabattre sur la partie gauche de la chaussée le temps du croisement. Bien entendu, les deux véhicules concernés devront klaxonner et se saluer courtoisement à l’aide de sympathiques appels de phare.

Corollaire au décret d’application ci-dessus énoncé : à tout moment un véhicule peut rouler en sens  inverse sur votre file de circulation, parfois même alors que la route est bonne, surtout sur autoroute où il est courant de croiser à contre sens un tuk tuk, un chameau attelé voire même un bus, aussi bien sur la voie de droite que de gauche??

Concernant les bus deux remarques :

Quand ils sont normalement chargés, c’est à dire 150 passagers dedans et 80 sur le toit, ils ont tendance à pencher du côté ou la majorité des mâles embarqués portent.

Se rappeler qu’un bus qui penche à droite aura tendance à rouler plus à gauche et inversement.

Deuxième remarque, certains bus de luxe sont chamarrés comme des arbres de Noël à l’avant comme à l’arrière, ce qui fait que avant de doubler un véhicule, après avoir longuement klaxonné et que vous apercevez au loin un arbre de Noël roulant, assurez-vous que vous voyez bien l’arrière d’un bus qui double au loin  et non pas sa face avant qui vient vers vous.

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De même sachez qu’il existe en genre de JEEP de l’espèce Mahindra, généralement blanche qui se voit très bien de loin. Ce qui se voit moins par contre, est que souvent ce genre de véhicule est chargée d’une sorte d’immense ballot contenant généralement de la paille ou du foin, ou peut-être de la laine, peu importe, ce qui importe est que le ballot a une  couleur indéfinie proche de celle du macadam, et qu’il dépasse de chaque côté de la Jeep généralement d’une dimension sensiblement égale à celle de la Jeep.

On a donc affaire à  un obstacle de dimension trois fois supérieure à la dimension apparente, ce qui peut être d’autant plus gênant que l’on a entamé une tentative de dépassement et que l’on se trouve inopinément en face d’un obstacle non seulement trois fois plus large que prévu, mais qui de plus roule au milieu de la route.

2) rouler au milieu :

Il est des fois où la seule portion à peu près praticable de la chaussée est constituée par une bande d’une dizaine de centimètres de large, pile poil au milieu de la route.

Dans ce cas le code de la route indien tolère que cette bande soit réservée aux motocyclettes de tous genres

En cas de croisement, l’équipage qui a le plus fort indicateur sonore a priorité, sinon c’est le nombre de membres d’équipage embarqué qui dicte la priorité : une moto avec 4 passagers, chose banale, aura donc, par exemple priorité sur une moto qui n’a que 3 passagers, chose quasi normale.

Autant dire que vous n’aurez jamais la priorité, car on rencontre jusqu’à des familles complètes, les géniteurs plus trois enfants et un bébé sur une 125 cm3.

Bien entendu en signe d’amitié il est courtois s’enfoncer la commande de klaxon, avant et pendant le croisement.

3) les bas-côtés :

En Inde les bas-côtés font partie intégrante de la chaussée et sont souvent en meilleur état qu’elle, il est donc d’usage courant de rouler pendant des kilomètres dans le sable, la caillasse, et autres détritus du bas-côté.

De plus en campagne très souvent la route à double sens a sensiblement la même largeur qu’une voie de circulation chez nous, l’usage du bas-côté est donc indispensable en cas de croisement et, ou de dépassement.

L’usage du bas-côté ne vous met pas pour autant à l’abri : comme il est de coutume que camions et bus se doublent en troisième file, et donc mordent sur ce même bas-côté, soyez à tout moment prêt à vous réfugier dans le bas-côté du bas-côté; auquel cas faites attention aux vaches et autres chèvres qui se considèrent chez elles dans ce domaine.

Le problème n’est pas tant de prendre le bas-côté que d’en sortir.

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En effet souvent la déclivité entre la partie goudronnée et le bas-côté est d’une bonne vingtaine de centimètres, facile à franchir en manœuvre descendante (au grand dam du fessier de la passagère) mais opération beaucoup plus délicate dans l’autre sens; auquel cas il faut guetter le prochain nid d’autruche adjacent au bord de l’asphalte pour l’utiliser comme tremplin (toujours au grand dam du fessier de la passagère).

4) le bas-côté du bas-côté :

Est d’usage courant lorsque trois véhicules arrivent de front, cas banal d’un déplacement en triple file, ce qui contraint le véhicule face à vous à rouler dans le bas coté

Cas limite : le bas-côté du bas-côté du bas-côté : manœuvre extrême qui explique le grand nombre de camions que l’on trouve couchés le long des routes.

Parfois la route est normale, comme chez nous, si ce n’est que la ligne centrale n’est jamais continue; comme, par ailleurs, il n’y a aucun panneau routier de quelque sorte que ce soit, limitant la liberté de circuler de chacun, il n’y a pas non plus de gendarmes sur les routes pour contrôler.

Le tout est cohérent et logique : comment et pourquoi contrôler quelque chose qui n’a aucune limite ?

Nous n’avons en effet vu ni stop, ni sens interdit, ni quoi que ce soit de ce genre en ville comme en campagne.

Toujours la même logique : à quoi servirait un sens interdit dans un pays ou même les autoroutes sont prises à contre sens.

Dans ce cas particulier d’une route « normale » subsiste néanmoins une interrogation sans réponse : est-on sur une route à sens unique, ou bien sur une route à double sens ?

En effet, en fonction de la densité relative de la circulation, il est courant que si le flux montant est beaucoup plus important que le flux descendant, tous les véhicules du flux montant circulent sur toute la largeur de la chaussée et se rabattent un peu vers la gauche juste pour laisser passer les quelques véhicules en flux inverse.

Comme d’autre part il est banal et courant que n’importe quoi, voiture à bras, touk-touk, voire même camion ou bus, remonte à contre sens même sur autoroute, on ne sait jamais sur quel type de voie on circule !

Les dépassements s’effectuent, selon les circonstances, par la droite comme par la gauche, peu importe du moment que l’on klaxonne.

Curiosité locale : le passage à niveau.

Dans ce pays les barrières, manœuvrées à la main, sont suffisamment hautes pour permettre, une fois baissées, de laisser passer les quidams locaux, les charrettes à bras et tous les deux roues.

Elles sont fermées longtemps avant le passage du train, et donc très rapidement s’installe des deux côtés un bouchon dense, qui couvre la chaussée dans toute sa largeur de tout ce que l’on peut imaginer comme véhicules, de la charrette à bras, au bus surchargé, sans oublié le fardeau tracté par un dromadaire dont la tête altière domine la mêlée.

La densité, la compacité des deux bouchons qui se font face est telle que rapidement les aventuriers qui ont violé une barrière, dans l’espoir de traverser les voies, se trouvent coincés à l’intérieur de l’espace protégé entre les rails et le front des véhicules, en compagnie des vaches, chèvres et même camélidés qui broutent le long des voies.

Fort heureusement le convoi ferroviaire s’annonce fort et longtemps à l’avance non pas pour les bipèdes, mais pour leurs frères à quatres pattes qui, dans un ballet réglé de longue date, s’écartent nonchalamment et libèrent la voie à la seconde et au centimètre près, la loi darwinienne de la sélection naturelle ayant éliminés les moins réactifs.

Enfin les barrières se lèvent !

On pourrait penser que telles les premières lignes au rugby qui s’encastrent violemment pour former mêlée, les deux premières lignes vont s’affronter !

Miracle de la philosophie indienne, les deux fronts s’interpénètrent, fusionnent, se fondent l’un dans l’autre dans une pagaille indescriptible ; mais relativement rapidement tout rentre dans l’ordre, enfin un ordre indien tout de même, c’est à dire un désordre efficace.

Bien entendu l’opération est rythmée par la cacophonie klaxonnesque rituelle.

Autre curiosité le brahmane reconnaissable à sa longue barbe, généralement blanche, à ses longs cheveux emmêles et son visage décoré de signes mystiques généralement jaunes et rouges.

Se sachant élu et protégé par les milliers de dieux du Panthéon indien, il traverse n’importe où et n’importe quand, sans regarder.

Il est à noter que les vaches, considérées comme sacrées dans ce pays, ont le même comportement d’indifférence totale à leur environnement, même l’usage prolongé du klaxon est sans effet sur ces êtres élus des dieux.

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Les ronds-points : se prennent souvent au plus court tout simplement. Donc quand cela est possible, inutile d’en faire le tour.

 » Qui a priorité dans un rond-point : celui qui entre ou celui qui est engagé ? », telle fut la question posée à un autochtone. Il fallut d’ailleurs la poser plusieurs fois car il ne la comprenait pas. Après réflexion se réponse pleine de sagesse fut :  » la priorité est à celui qui passe ! »

L’indien est très tolèrent, n’hésitez donc pas à vous arrêter à quatre de front pour discuter de la meilleure route à prendre, ou à bloquer la circulation si vous avez calé au milieu de la chaussée et que malgré vos coups de kick énergiques, cette putain de bécane refuse de démarrer, car alors curieusement personne ne klaxonnera…

Cette tolérance explique qu’en pleine campagne vous verrez souvent des camions tout seuls, sans chauffeurs, arrêtés sur la chaussée !

Le casque :

Il est d’usage inconnu en campagne.

Dans la grande ville, curieusement seul le conducteur porte un casque, qui peut être un vieux casque de chantier avec une ficelle pour jugulaire.

S’il y a 4 passagers sur la moto, seul le conducteur porte un casque ???

En sont dispensés les Sikhs et autres enturbannés, car il faudrait un casque beaucoup trop grand, ainsi que les femmes.

Ces dernières montent en amazone sur le porte bagage aménagé à cet effet avec un petit marchepied et un filet de protection pour que le sari ne se prenne pas dans la roue arrière. Généralement elles ont un bébé dans les bras, un enfant entre elle et son mari, plus parfois deux enfants sur le réservoir; total 6 !!

Conduite de nuit :

À éviter !

Ce n’est pas tant que les véhicules borgnes, sans éclairage du tout, ou toujours en pleins phares, limitent les dépassements, que le fait que de nuit comme de jour, les vaches sacrées déambulent tranquillement sur les chaussées, et comme elles n’ont pas de catadioptres…

Les travaux :

Là nous frôlons le surréalisme !

Imaginez une bande de chaussée de 20 km, totalement défoncée, d’une largeur moindre que celle d’un camion, puisque le train arrière à double roues voit une partie des pneus extérieurs déborder de l’asphalte.

Cette bande est bordée de chaque côté par deux zones en travaux (ou on ne voit personne travailler, comme chez nous d’ailleurs) qui sont environ 30 cm en contrebas, constituées d’un coté de terre damée prête à être recouverte de bitume, mais condamnée à la circulation par de grosses pierres, entre lesquelles il faut slalomer, et de l’autre d’un terrain sableux et accidenté impropre à la circulation motocycliste, sauf si vous avez plusieurs enduros du Touquet à votre actif ! Bien entendu cette route est ouverte à la circulation à double sens !

Les croisements se font dans une forme de rodéo inimaginable : soit les deux conducteurs ont un klaxon d’égale puissance, auquel cas chacun met une roue en contrebas dans la poussière; soit l’un des véhicules a vraiment un klaxon hors norme, l’autre n’a d’autre choix que de se précipiter dans une des zone de travaux.

Quant aux motocyclettes, fussent-elles indiennes, donc acclimatées à ce genre de situation, elles font ce qu’elles peuvent, dans un nuage permanent de tempête de sable.

Un Paris-Dakar en miniature mais avec passagères à l’arrière et gros camions et ou bus au choix, qui font rien qu’à chercher à vous faire peur !

Et ils y arrivent.!!!

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Chose étonnante qui aurait plu à Jean Giono.

Une route en début d’état de travaux : les bas-cotés sont profondément bouleversés, différents matériaux entassés de ci de là, attestent de l’intention de réfection, mais rien n’est entamé

Par contre sur des kilomètres, tous les 10 m, sont implantes des cylindres verticaux d’environ deux mètres, de grillages renforcés de cornières d’acier, peints aux couleurs nationales, pour protéger de jeunes pousses d’arbres de la voracité des vaches sacrées !

Quel curieux mais sage pays qui plante d’abord des arbres avant que de faire la route.

Ceci étant on voit peu d’accidents.

Hormis les nombreux véhicules hors d’âge, les voitures récentes ont des carrosseries dans un état voisin de ce que l’on voit en région parisienne, car somme toute les indiens sont d’excellents conducteurs, et s’accommodent de toutes situations sans jamais d’agressivité.

Pour preuve les cinq couples de retraités que nous étions ont survécu.

En fait, chaque action de conduite est sujette à affrontement, mais comme cela se fait de façon ludique, sans agressivité, il y a toujours un des deux acteurs qui cède, et ça passe. Au millimètre près, mais ça passe…

Chez nous latins, l’affrontement est rarissime, puisque tout est réglementé, mais si il a lieu, alors, le réflexe ancestral du mâle dominant fait qu’aucun ne cède, et cela ne passe pas, ça casse !

En fait nous sommes dans deux extrêmes, libéral du côté indien, soviétique chez nous, avec un gendarme derrière chaque panneau.

Vu la densité de circulation et l’état de leur infrastructure, le système totalement non réglementé est le seul qui puisse marcher, et il marche !

Ces quinze jours de conduite en Inde m’auront appris plus sur les possibilités d’exploitation d’une moto qu’en, hélas déjà, cinquante ans de conduite régulière et intensive.

Cela d’autant plus que nos gentils et taquins accompagnateurs n’ont pas manqué une occasion de prendre des raccourcis où l’on s’ensablait jusqu’au moyeu, gravir des pentes rocailleuses en sautant et chassant de l’arrière, où l’on ne pouvait ni s’arrêter ni même ralentir, de peur de caler et d’avoir à redémarrer au kick dans des conditions scabreuses, et autres joyeusetés…

Si l’expérience vous tente, une seule adresse « vintagerides.com »

Quelques flashs :

Flash sur les multitudes d’enfant, beaux comme tous les enfants, qui nous courraient après en faisant de grands signes d’amitié en ville, où tendant la main en campagne.

Flash sur les écolières et écoliers, tous en uniforme, même dans les villages les plus sordidement pauvres.

Flash sur cette jolie petite fille de 13 ans peut être, qui voyant un tout petit veau traverser la route, s’est précipitée pour l’enlever à bras le corps et le porter sur le côté de la route.

Flash sur tous ces conducteurs de bus, tracteurs, camions, qui, systématiquement mettaient deux roues dans le bas-côté pour nous laisser passer en faisant des signes amicaux.

Flash sur ces temples grandioses de pureté dépouillée ou chaque centimètre de marbre est travaillé.

Flash sur ce tout petit bébé chien, à peine plus gros qu’un poing qui dormait au milieu de la chaussée et que nous avons tous évité de justesse sans qu’il ne se réveille.

Flash sur ces gens surgis de nulle part, où que l’on soit, en plein désert comme en montagne sur des chemins perdus, loin de tout.

Flash sur ces curieuses autoroutes avec passages piétons qui traversent les 6 voies, bus qui s’arrêtent pour charger des passagers en pleine campagne, grue qui releve un camion couché dans le bas-côté et qui condamne deux voies sur trois sans aucune signalisation…

Flash sur les antres de forgerons où, systématiquement, ce sont de frêles femmes en sari qui manient à tours de bras la masse, alors que l’homme accroupi présente l’acier rougi sur une enclume de fortune.

Flash sur cette forêt de jambes de chameaux stationnés sur la chaussée, qu’il a fallu tant bien que mal traverser au ralenti, pour ne pas les effrayer.

Flash sur ce quidam à vélo qui, sur une route de montagne, portait autour du corps un châssis de lit en travers du corps et qui, tranquille, roulait au milieu de la mince chaussée contraignant les bus et camions à le croiser ou à le dépasser en roulant dans le bas-côté.

Flash sur ce vieux Rajah qui, songeur, faisait les cent pas dans son minuscule jardinet, annexe de son palais grandiose et délabré, où le minimum a été restauré pour faire des chambres d’hôtes, et où seules des photos jaunies attestent de la grandeur en une génération perdue.

Flash sur le staccato des motos qui parfois se mettaient en harmonie.

Flash sur la multitude de couleurs vives des saris des femmes accroupies qui refont les voiries à la main, en coulant dans les innombrables trous un mélange de goudron et gravier chauffé sur des braseros.

Flash sur les mêmes femmes, toujours accroupies, qui fabriquent sur place le gravier en émiettant au marteau, des blocs de roche.

Flash sur les mines réjouies des multiples passagers des motos croisées.

Flash sur ces magnifique chambres d’hôtel souvent décorées de splendides et précises frises minutieusement faites à la main, alors que leur salle de bain atteste de finitions bâclées et fuyantes.

Flash sur la silhouette en hayons, accroupie sur un tas d’immondices dont il se distinguait à peine, le téléphone cellulaire collé à l’oreille.

Flash sur les femmes vêtues de saris chatoyants portant de façon majestueuse et altière leur fardeau de bois sur la tête.

Flash sur le handicapé, en chaise roulante bricolée maison, sur l’autoroute en pleine campagne, environné de camions énormes comme je croyais que seuls les Australiens en avaient.

Flash sur cette jolie petite fille de 5 ou 6 ans, à la tignasse poisseuse et emmêlée, qui n’a jamais connu ni peigne ni shampooing, et qui au pied de l’arbre à chauves-souris tentait de me faire comprendre en tendant sa petite main que c’étaient ses chauves-souris à elle, et qu’il fallait que je lui donne mon obole pour les photographier.

Je m’en veux encore de ne rien lui avoir donné, lassé de tant de mains tendues.

Flash sur cette autre petite fille aussi jolie, mais bien propre et bien habillée qui voulait me vendre un lot de stylos chamarrés au pied du fort aux éléphants. Ayant repérer que régulièrement les gamins et gamines allaient discrètement montrer leur besace à un « grand frère », qui vérifiait l’état du stock, je lui donnai, à l’abri de tous regards, quelques dizaines de roupies sans rien lui prendre. Le moment d’étonnement passé, et après avoir vérifié que ni ses collègues enfants vendeurs exploités, ni son grand frère ne pouvaient avoir vu la chose, elle s’empressa d’enfouir dans ces vêtements les quelques billets avec un regard de reconnaissance qui valaient quelques milliers de roupies.

Flash enfin sur le devenir de ce pays qui est sensiblement, dès que l’on quitte les très grandes agglomérations, au niveau de notre Moyen-Âge européen, si ce n’est qu’au Moyen-Âge tous les détritus éteint comestibles par les chèvres et cochons, alors que là…

A ce jour perdure toujours le système de castes dont sont issus les Mittal, Tata, Kapur.

Ce ne sont pas des Ford ou Rockefeller partis de rien, ce sont des maharadjas reconvertis; ce système bloquant l’émergence d’une saine concurrence, condamne l’avenir de ce pays. Cela d’autant plus que, régulièrement, les autorités suppriment les visas des étrangers, Chinois surtout, qui développent une activité pouvant porter ombrage à une activité captive d’un membre de la caste dominante.

La résignation religieuse de chacun à la médiocrité de sa propre condition interdit toute révolution salutaire. Seuls les chiffres font croire à un avenir pour ce pays, mais que valent nos chiffres ???

La moitié de la population a moins d’un euro pour vivre au quotidien !

Quand on part d’un tel niveau, tout chiffre de progression est stupide.

Et puis ces enfants, ces enfants, ces multitudes d’enfants …

Je crains fort qu’à terme, cela ne se termine par une forme d’implosion démographique !

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