Au delà de Magotcha…


ptiluc1

Au petit matin, trois degrés, petite pluie fine, pas loin de la neige fondue… Je me rends subitement compte que c’est mon premier jour de temps maussade,   premier jour de presqu’hiver ; un entre deux, un temps suspendu, voire deux, le météorologique qui hésite encore à plonger dans le froid et puis l’autre, celui des heures qui s’écoulent, des fuseaux horaires qui changent ; sans repère sous un ciel plombé, ce temps-là est lui aussi en suspens. Piotr aurait bien voulu partir à l’aube, mais l’aube a disparu et il est un peu ramolli par les quelques coups de vodka qu’il a tenu à boire avec moi la veille. Les polonais n’ont vraiment rien à envier aux russes dans le domaine très pointu de la pente du gosier.

Les collines défilent, noyées dans le brouillard,  à chaque tranche de cent bornes, je prends une soupe, ces petites pauses permettent aux écarts qui séparent le petit Giléra de ma grosse Béheme de légèrement s’atténuer… L’après midi ça se durcit, la pluie devient vigoureuse mais je suis bien équipé…j’arrive à Skorovodino en fin d’après midi, c’est une autre petite bourgade informe ; j’ai juste le temps de trouver un hôtel et d’envoyer le message habituel à Piotr qui arrivera une heure plus tard, confirmant sa moyenne de cinquante à l’heure et l’étanchéité pas terrible de ses équipements. Mauvaise pioche, ça paraissait tranquille, un peu à l’écart, mais c’est aussi la boite de nuit du village et nous sommes samedi soir…me voilà bon pour les boules Quies…Piotr roupille comme un bloc de granit, il y en a qui ont des talents surprenants…demain, nos routes se séparent…

Juste rester au plumard…


ptiluc1

Rouler avec Piotr m’aura finalement appris que voyager lentement ne change rien à l’affaire…on arrivait toujours aux mêmes endroits,  je faisais juste des pauses plus longues… Sur son petit scooter, il rencontre les mêmes gens, il s’arrête aux mêmes endroits, il est juste dans une autre dimension temporelle. Pour l’espace, nous sommes plutôt raccord… Si, sur une piste défoncée, dompter une moto est plus gratifiant que pousser une mobylette, il faut bien reconnaître que sur les longues routes goudronnées, la seule différence c’est le sens de la durée…On finit donc ,trois jours de suite, aux mêmes endroits…A Mogosha, Piotr essaye de trouver pourquoi sa mob est si fatiguée et moi, je ne cherche pas à comprendre pourquoi je suis  si fatigué…je me repose, c’est tout,  je reste au lit à dessiner, il n’ y a rien à visiter ici ; le soir les mecs bourrés surgissent de nulle part comme des zombis, si tu les croises, t’es foutu…la chambre est bien chauffée, les douches aussi, pourquoi ne pas en profiter  pour ne pas mettre le nez dehors?

Mogotcha est en exclusivité sur :  https://youtu.be/NtPWWAIO4I8