L’édito du Moto Magazine 362 de novembre 2019


jptheodore

L’Asie tous azimuts ?

Chine-Japon : la guerre des prix commence… Ce titre de couverture qualifiant notre comparatif principal CF Moto 650 MT contre Yamaha Tracer 700 augure en fait des transformations bien plus vastes sur le marché de la moto. Ce dernier arrive en effet à un tournant car les machines de loisir destinées aux motard(e)s chinois(e)s, et indien(ne)s, correspondent aujourd’hui aux entrées de gamme des constructeurs japonais et européens. En termes de conception comme d’équipements. Hormis la CF Moto, citons là trois autres exemples : les Royal Enfield 650, les Benelli 500 (non, elles ne sont plus italiennes) et les Cyclone 400, émanation d’un des plus gros fabricants de deux-roues de l’Empire du milieu, Zongshen. Et pour mesurer l’impact possible de l’arrivée de ces asiatiques en Occident, rappelons quelques chiffres : Japon, 300 000 ventes par an ; USA, 400 000 ; Europe, 1 million ; Chine, 15 millions ; Inde, 22 millions. On voit là que la conception d’un modèle compatible avec nos attentes sera rapidement amorti, et diffusé à un tarif défiant toute concurrence durant quelques décennies encore !
Certains diront qu’il s’agit là de pâles copies… Mais n’oublions pas que l’histoire industrielle s’en est constamment nourrie. La française Ratier 750 Cemec calquée sur la BMW R12. Les disques rotatifs des 2-temps piqués par Suzuki à MZ. La Laverda 650 de 1966 fortement inspirée de la CB 450 Honda DOHC…
Reste à savoir si les industriels indiens et chinois s’intéresseront à des machines plus luxueuses, coûteuses à mettre au point et somme toute vendues à un très faible nombre d’exemplaires. Il y a plus à parier qu’ils investissent le marché de l’électrique urbain à l’heure où nombre de nations pensent transition écologique…

Jean-Pierre Théodore, rédacteur en chef

L’édito du Moto Magazine 361 d’octobre 2019


jptheodore

Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage

Les motos répondant à la dernière norme, Euro 4, seraient de 3 à 10 fois plus polluantes que les autos Euro 6 en conditions réelles d’utilisation selon le rapport True de l’organisme ICCT (Conseil international pour le transport propre). Voilà un argument qui va nous faire passer pour des destructeurs de la planète en puissance et pousser les pouvoirs publics à éradiquer les deux-roues à moteur thermique de nos cités ! Au point que la mairie de Paris réfléchit déjà (lire page 8) à durcir son calendrier pour les interdire plus tôt que prévu…
Les progrès sont bien sûr souhaitables pour amoindrir les émissions gazeuses, et déjà en cours puisque Euro 5 est pour 2020 ! Le problème de ce rapport, c’est qu’il s’appuie sur une mesure instantanée des taux de CO et de NOx sans tenir compte des temps de parcours et donc d’utilisation, incomparables en zone urbaine entre moto et auto.
Si ces annonces-chocs étaient suivies d’effets (reste à prouver leur validité juridique), il suffirait que 10 % des utilisateurs de deux-roues motorisés recourent à leur voiture pour que le trafic soit paralysé aux heures de pointe. Ceci en imaginant, pour commencer, que les 90 % restants trouvent une place dans les transports en commun… Une gageure. Et à l’inverse, une étude de l’université de Louvain (Belgique) en 2011 a montré que le simple basculement de 10 % de la circulation automobile vers le 2RM suffirait à réduire les embouteillages de 40 % !
La FFMC et Moto Magazine s’indignent qu’on puisse utiliser des chiffres de façon partielle – et donc partiale – pour sommer les utilisateurs de mettre à la casse des véhicules hyper récents sous prétexte qu’on n’a pas laissé le temps à leurs constructeurs de s’aligner en termes d’émissions ! Une injustice propre à mettre de l’eau dans le gaz…

Jean-Pierre Théodore, rédacteur en chef