Quand le mythe rencontre le mystique… L’abbaye Saint-Martin de Ligugé (Vienne) accueille des moines bénédictins, parmi lesquels Frère François, un homme en prière qui s’adonne parfois à la méditation sur deux roues. Outre sa vie au dieu des catholiques, Frère François voue un culte étrange à l’icône païenne qu’est la moto.
Il n’a pas le permis mais parcourt 2 500 km chaque année, passager intérimaire au gré des rencontres. « Je fréquente les marins pêcheurs au Croisic (Loire-Atlantique), et beaucoup d’entre eux sont motards », précise l’intéressé.
Passionné, l’ecclésiastique a détourné un demi-siècle de savoir-faire religieux appris dans l’atelier de l’abbaye. Il travaille l’émail et la peinture d’or… « Sur une plaque de cuivre galbée, on répand des cristaux d’émail et on cuit. Puis je décalque la photo d’une moto de profil et trace ses traits sur la plaque à l’aide d’un pinceau trempé dans l’or ». Comment le frère choisit-il ses modèles ? « Je regarde celle qui attire le pinceau. J’ai la sensation de la fabriquer en la dessinant ».
Cet intellectuel, enseignant en théologie à l’institut catholique de Paris, aborde sa passion avec philosophie : « A moto, j’apprécie le contact avec la nature, mais aussi la camaraderie virile qui caractérise les balades en groupe. Faire la route est un reflet de la condition humaine : on ne vit pas sans risque ».
Le moine se hasarde même beaucoup plus loin : « Quand on roule on fait corps avec la machine. Un homme fait l’amour d’une manière ou d’une autre… » Parmi ses rencontres, le critique d’art Paul Ardenne, auteur de l’essai remarqué, « Moto mon amour ». Ces deux hommes ont en commun d’esquisser ce qu’ils ressentent au guidon. A lire, et à découvrir.
Exposition : « Un siècle d’or de la moto », émaux de François Cassingena-Trévedy, du 17 mai au 30 juin 2013 à l’abbaye Saint-Martin de Ligugé (Vienne). Renseignements : 05 49 55 21 12 ; 06 66 47 49 63).