Photographie : le voyage original d’un Mexicain à dos de BMW R75/5


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Le photographe mexicain Gonzalo Lebrija parcourt son pays au guidon d’une BMW R75/5, et l’utilise d’une manière originale : son travail, baptisé « Toaster », consiste à prendre en photo le paysage à travers le reflet du réservoir chromé de la Béhème (duquel est tiré le surnom de « toaster », ou grille-pain).

A chaque arrêt, Gonzalo prend deux photos : l’une, classique, est celle d’un paysage, dans lequel il intègre la R75/5. Puis il se rapproche, et photographie le contrechamp dans le miroir que forme le réservoir chromé.

Le résultat forme un diptyque : en haut et en grand, le paysage déformé vu à travers le réservoir. En bas, plus petit, la vue opposée, une photo prise à hauteur d’homme. Au centre, les coordonnées GPS précises de la prise de vue. Cette rigueur donne au travail de l’artiste une valeur d’observatoire du paysage, quasi-scientifique.

En 2006, Gonzalo Lebrija a traversé la péninsule mexicaine de Basse-Californie, de San Diego à Mexico City. Les 66 diptyques de la série « Toaster » représentent une sorte de carnet de ce voyage particulier. Ils sont exposés à « Motopoétique », au musée d’art contemporain de Lyon (attention, cette expo ferme ses portes le 20 avril, il ne reste qu’un week-end pour s’y rendre !)

Qu’apporte cet autre regard ? « La juxtaposition du champ – contrechamp a comme intérêt de montrer ce que l’on ne voit pas, l’envers du paysage qui se situe dans le dos du photographe », commente Mahaut de Laage, paysagiste qui visitait l’exposition à nos côtés. « C’est comme si la moto avait un regard spontané, sans cadrage ». Magie de l’illusion…

On éprouve la sensation que la moto permet de se fondre dans l’environnement dans laquelle elle circule.

On peut aussi voir dans ces clichés déformés des apparitions irréelles, comme les surimpressions que l’on aperçoit parfois à travers la visière du casque, sur la route, quand la luminosité s’amenuise, quand la fatigue gagne et les pointillés blancs des lignes au sol se confondent avec notre ligne de vie.

« L’œuvre de Gonzalo Lebrija s’intéresse, avec un certain humour, à des questions liées à la société mexicaine, en faisant appel à des images types, telles la moto », souligne le musée de Lyon aux visiteurs. La BMW R75/5 miroir de la société, voilà un bel hommage à la production motocycliste.

Vue de l’expo « Toaster » à la galerie Laurent Godin en 2008

Photo : 40 déclics de motos d’Afrique contre le Sida


Motoculture

L’ouvrage de photographies « Motos d’Afrique » a été auto-édité par l’association Moto Action Sida en version numérique imprimable. Il s’impose comme un magnifique témoignage en images de la pratique du deux-roues sur les goudrons bosselés, entre Sénégal et Cameroun.

Valérie Sandres et Yves Manga sont les cofondateurs de l’association Moto Action Sida, une organisation créée en 2005, dont la vocation est de lutter contre le Sida en Afrique en s’appuyant sur la dynamique des motos taxis, premier moyen de transport et lien social incontournable aujourd’hui sur ce continent.

A l’heure du Sidaction (du 4 au 6 avril 2014), il est utile de rappeler que les découvertes de séropositivité ne faiblissent pas en France. De même, la contamination par le virus VIH continue de progresser dans les pays pauvres, en Afrique notamment.

En 2008, Valérie et Yves ont entrepris un périple depuis Dakar (Sénégal) jusqu’à Yaoundé (Cameroun) afin d’aller à la rencontre des motards africains et de mettre en place leur concept de campagne itinérante Moto Action Sida. Résultat : des dizaines de rencontres avec des motos taximen, fondus de bécanes, réparateurs, usagers etc. Autant  d’images évocatrices et insolites qu’ils ont choisi de rassembler dans l’ouvrage : « Motos d’Afrique » auto-édité en 2009, disponible sur la plateforme d’édition numérique Blurb.com.

Le tirage est resté confidentiel, essentiellement dédié à expliquer leur projet aux partenaires qui soutiennent leur initiative, parmi lesquels la Mutuelle des Motards. Mais il demeure d’actualité, à l’heure où la moto en Afrique est devenue indispensable pour désenclaver les villages, faciliter la communication, émanciper les hommes comme les femmes.

La moto représente là bas un vrai symbole de liberté, d’autonomie, d’affirmation de soi et d’expression de style. Dangereuse mais tellement nécessaire, elle se pratique à 3, 4, 5 voire 8 personnes et permet le transport de tout, du nourrisson au réfrigérateur. Ses conducteurs font des prouesses chaque jour avec beaucoup d’inventivité et débrouillardise sur les routes bien souvent endommagées et les pistes accidentées.

« Motos d’Afrique » est un ouvrage à découvrir, et pourquoi pas à commander, ce qui constituera un soutien de l’association Moto Action. Ce livre est aussi simplement consultable en ligne ; si vous souhaitez en savoir plus sur l’association, et la soutenir autrement, rendez vous sur www.motoaction.org.

« Motos d’Afrique », photos de Valérie Sandres et Yves Manga, auto-édité sur Blurb.com ; 40 pages, 33 x 28 cm ; 65 euros + port.

Femmes et moto : les photographies cultes de Lanakila MacNaughton


Motoculture

Le 8, c’est la journée internationale du droit des femmes et le 9, les défilés Toutes en Moto. Le moment est donc propice, de passer quelques clichés cultes, réalisés par la photographe de Portland (Oregon, USA) Lanakila MacNaughton.

Ici c’est Summer, coiffeuse, snowboarder et motocycliste sur son scrambler Honda.

Là c’est Stormie Ray sur une 650 Yamaha, qui roule depuis 20 ans et a guidé Lanakila vers la liberté.

On trouve aussi Allison Rose Lear, classe, sur son Sport’ à guidon bracelets.

Sans oublier les easy rideuses et délurées Jenny et Nina, qui se moquent bien des cops sur leur Harley.

Lanakila en a immortalisé beaucoup d’autres. Ses photos sont cultes, car sans concession. Lanakila s’évertue à n’immortaliser que des femmes sur leur moto, et celles-ci ont plutôt envie de se montrer libres au guidon, de s’affranchir des codes et des usages… Et ça nous plait !

Cultes, car le travail est soigné, propre, c’est l’œuvre d’une esthète : les photos, qu’elles soient posées statiques ou en mode dynamique, racontent une histoire, la lumière est soignée, les lignes de perspectives filent vers l’horizon.

Lanakila MacNaughton (ci-dessus) est donc une photographe et motocycliste basée à Portland (Oregon, USA). Ayant pratiqué de nombreux sports de plein air dès son jeune âge, Lana a commencé à raconter ses expériences à travers la photographie. Après avoir développé une passion pour la moto à 20 ans, elle a commencé à immortaliser les nombreuses facettes de la culture de la moto à travers son objectif. Lana tire en moyen format sur un Hasselblad CM.

« J’ai créé Womensmotoexhibit afin de montrer la nouvelle vague de femmes motocyclistes, explique-t-elle sur son site. Je tiens à révéler des femmes courageuses et belles. La moto est un véhicule qui favorise une nouvelle perception de l’autonomisation des femmes, et inspire l’indépendance et la libération. Womensmotoexhibit est une exposition itinérante. J’espère découvrir encore des rideuses issues de différentes communautés. Je veux changer la façon dont les femmes sont perçues, non seulement dans le monde de la moto, mais la société en général ».

« J’invite différentes communautés et lieux à accueillir cette exposition, pour aider à cette découverte ». Avis à la population !

Découvrir le projet de Lanakila : Womensmotoexhibit.com

Photo d’art : les « anges » pilotes de Rancinan exposés à Lyon


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Au musée d’art contemporain de Lyon (MAC Lyon), jusqu’au 20 avril, se déroule une belle rencontre entre différentes formes d’expression artistiques et la moto. Au milieu des œuvres de 42 artistes, l’exposition Motopoétique ouvre une salle à Gérard Rancinan, photographe de renommée mondiale qui a, à plusieurs reprises, œuvré autour de sa passion pour la moto, comme le prouvent les sept clichés en grand format (160 x 230) accrochés au MAC Lyon.

Les passionnés auront reconnu, sur la photo ci-dessus (© Gérard Rancinan, « Double Damon », 160 x 230 cm, 1997), l’ancien champion de F1 Damon Hill, hilare au guidon d’une moto de collection, une 1000 Vincent HRD Black Shadow.

Autre star portraitisée, le Docteur, Valentino Rossi, dans une pause plutôt baba-cool, assez éloignée de la moto. La photo date de 2001. Son rival des débuts, Massimiliano Biaggi, a lui aussi posé dans un cadre grandiloquent pour Rancinan. On retiendra également « Genèse », photo tirée d’une publicité pour Ducati datant de 2003, qui officialisait son retour en Grand-Prix.

Mais les images les plus saisissantes restent les photos d’action de Raymond Roche (© Gérard Rancinan, « Raymond Roche : La vitesse des Anges » , 110 x 163 cm, 1991), le pilote français, champion du monde d’endurance en 1981 et 3e du championnat du monde de vitesse en 500 cm3, en 1984.

Le choix d’une mise en place la plus légère possible traduit la volonté de Rancinan de « rappeler toute la fragilité et le risque que l’on prend quand on conduit une motocyclette ».

Aux yeux de l’artiste, « la moto n’a rien d’un objet utilitaire, mais tout d’un objet artistique ». La moto l’intéresse en ce qu’elle révèle « un univers à plusieurs dimensions, de plaisir et d’émotion ». Il la voit comme « un objet d’art », de même qu’il voit les pilotes « non pas comme des motards mais comme des anges ou des virtuoses ».

Gérard Rancinan expose dans les plus grands musées d’art contemporain du monde. Après le Palais de Tokyo, le Musée d’art moderne de Barcelone, le Musée de la Triennale de Milan, le Danubiana Museum en Slovaquie, il représente la France cette année dans le cadre du cinquantenaire des relations franco-chinoises en exposant au musée d’art contemporain Himalayas de Shanghai en septembre prochain.

Le site de Gérard Rancinan

La série de photos Speed Art réalisée par Rancinan pour Ducati en 2003

Le photographe Hassan Hajjaj expose ses Kesh Angels à New-York


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Le photographe Hassan Hajjaj fait à nouveau parler de lui, en exposant ses photos de la série Kesh Angels à New-York, au Taymour Grahne Gallery, jusqu’au 7 mars.

Kesh comme Marrakech la marocaine, patrie d’origine du sieur Hajjaj, qui vit désormais en Angleterre.

Angels comme les one percent, les walkyries voilées mais extravagantes du photographe affirmant leur esprit de liberté et leur rébellion en chevauchant, dans des positions provoc’, des motos rutilantes. La moto, un loisir réservé aux hommes, au Maroc…

Dans cette série joyeuse et colorée, Hajjaj s’amuse à détourner un classique de la photographie africaine, le portrait de famille statique en studio avec tenue traditionnelle, sur fond de tissus aux motifs bigarrés. L’un des représentants les plus emblématiques de ce courant étant le photographe malien Malick Sidibé, qui travaillait lui en noir & blanc.

Et voici la version avec deux-roues

Hajjaj détourne les symboles pour dénoncer une société traditionnaliste ayant du mal à basculer dans la modernité. Il marie ainsi le voile et la moto, les tissus d’Afrique prisés des Occidentaux et les logos des marques de sportswear occidentales, emblèmes d’une mondialisation libérale et galopante.

« Le travail de Hajjaj joue sur un chamboulement des stéréotypes, le pouvoir du marketing, et la familiarité des objets de tous les jours, apportant une approche urbaine à ses multiples influences, ses objets et ses indicateurs culturels de façon à imprégner son travail d’une sorte de tension électrisante », explique le Taymour Grahne Gallery.

« Ses portraits de jeunes femmes portants le voile et la djellaba et posant sur des motos bouleversent les idées préconçues que l’on peut se faire des femmes arabes : ses modèles sont vêtues traditionnellement mais arborent un air de défi moderne, affichant des sourires rayonnants et des signes de jeunesse, d’indépendance, de fête et d’amusement. »

Les motos sont belles, mais n’ont que peu de valeur, à nos yeux de riches européens : point de Harley Davidson ici, de pâles copies chinoises de japonaises surannées. Les deux-roues que l’on trouve, en abondance, au Maroc. Peu importe, elles ne sont pas le sujet même si les symboles qu’elles véhiculent, la liberté, la rébellion, les rendent incontournables dans le cadre de Hassan Hajjaj.

Cela nous rappelle (de loin certes, mais on peut s’amuser !) l’œuvre d’un autre provocateur : en 65, dans « Motorpsycho », l’Américain Russ Meyer tentait d’effrayer le bon peuple en faisant déferler un trio de bikers dans une petite ville perdue.

Faute de budget, les méchants garçons chevauchaient de petites cylindrées, et la vision de ces grands gars gauches sur leur petit deux-roues atténuait en partie la portée de leurs nuisances.

« Marrakech est une ville de moto », explique Hassan Hajjaj au HuffPost Maghreb. Les femmes circulent à moto surtout « par nécessité », comme une grande partie de la population, « des jeunes enfants aux familles, sans oublier les personnes âgées ».

Hassan Hajjaj expose, pour la première fois à New-York. La série Kesh Angels est accrochée au Taymour Grahne Gallery, jusqu’au 7 Mars 2014.

Et tant qu’on y est, on peut visionner, en entier, « Motorpsycho », de Russ Meyer :

Beau livre : Nationale 7, la Road 66 à la française


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Ce livre de photos sur la Nationale 7, mêlant reportage et récit de voyage, a déjà 5 ans mais n’a pas pris une ride. La Nationale 7, l’une des routes historiques de la migration estivale entre le nord de la France, la région parisienne et la Côte d’Azur… Les deux auteurs l’ont parcourue comme des photographes américains auraient fait la Road 66.

En résulte un émouvant road trip en noir et blanc, à la française, avec des portraits tracés au cran d’arrêt et des ambiances surgies de nulle part. Les bas-côtés, les temps morts, l’envers du décor… L’iconographie est servie par un texte poétique.

Le photographe et l’écrivain ont roulé, et se sont arrêtés. Ils n’ont pas seulement immortalisé les ambiances, les stations-services à la dérive, les enseignes de snack. Ils ont trouvé des personnages qui campent là, en bordure de route. Leur voyage est empreint de réalisme et d’une certaine lassitude, une usure du quotidien, qu’on ne s’attend pas à trouver quand on part en voyage.

Un beau livre, qui donne malgré tout envie d’enfourcher sa moto pour parcourir cette douce France que Trénet avait magnifiée en son temps. Avant d’être démystifiée par certains de ses descendants, parmi lesquels Rachid Taha et le groupe Carte de Séjour. Albéric d’Hardivilliers et Matthieu Raffard, les auteurs de cet ouvrage, s’inscrivent à la frontière entre réalisme et poésie.

Beau livre : « Nationale 7, un road trip à la française », par Albéric d’Hardivilliers et Matthieu Raffard ; éditions Transboréal ; 112 pages, 22,4 x 22,4 cm ; 18 euros.

Avant de partir, la mélodie du bonheur…