Très riche, l’exposition d’art contemporain Motopoétique, au MAC Lyon jusqu’au 20 avril, permet de découvrir des artistes motocyclistes. Parmi lesquels Shaun Gladwell. Cet Australien est l’auteur de deux installations vidéo : « Approach to Mundi Mundi » (2007) et « Apologies 1-6 » (2007-2009), sur Yamaha R6.
La première traduit la poésie que l’on peut ressentir au guidon, cette forme de légèreté, quand on traverse un paysage désertique immuable, propice à la rêverie. Il nous est tous arrivé de se transposer dans un ailleurs inacessible, et Shaun vient d’ailleurs.
La seconde décadre le rôle que la société associe au motard : sur une route fréquentée par de monstrueux poids-lourds, le conducteur d’une moto, au lieu d’être l’accidenté de service, descend de sa machine et transporte le cadavre d’un animal pour le protéger de la circulation. Ce casqué carapacé de cuir serait donc doté d’un cœur…
Ultime acte artistique présenté à Lyon, amusant, la « Moto Suzuki GSX-R 1100 » (1997) dont la roue avant passe à travers un mur… Hum, problème de freinage !
« Les installations vidéo de Shaun Gladwell mettent en scène la culture du skateboard, du BMX et de la moto, alliant sport extrême et esthétisme », précise le dossier fourni par le musée de Lyon. Gladwell filme au ralenti, imposant une vision aérienne et éthérée du ride à moto, loin du bruit et de la fureur généralement évoqués.
Nous ne montrerons pas ces installations vidéo, qui sont des œuvres originales, mais nous avons rencontré Shaun, et il a bien voulu répondre à quelques questions.
C’est votre moto qui apparaît dans l’installation baptisée « Approach to Mundi Mundi » ?
Il s’agit de ma propre Yamaha R6. J’aime les sportives, mais je préfère les petites cylindrées car je pratique le stunt. Elles sont plus maniables.
Sur quelle route est tournée cette vidéo ? Le paysage désertique est très évocateur.
Il s’agit d’une route australienne, dans une partie reculée près de Broken Hill, à l’extrême ouest de la région de New South Wales (au centre du pays). C’est là que j’aime rouler. La route est longue de plusieurs centaines de kilomètres, c’est juste au milieu de nulle part, dans le désert. J’adore rouler à moto en Australie. C’est très beau. On a parfois l’impression de conduire au milieu de l’océan alors qu’on est dans le désert.
Que cherchez-vous à transmettre au public ?
La liberté que l’on éprouve au guidon. Vous avez l’impression de voler, alors que vous restez connecté à la terre. On ne ressent cela qu’à moto : vous avez l’impression que vous pouvez lâcher le guidon, tout est automatique, vous avancez comme si vous déployiez vos ailes. Ce sentiment de liberté est vraiment fort, et cela explique pourquoi nombre de personnes sont droguées à la moto.
Comment avez-vous filmé cette scène, dans laquelle le motard apparait de dos, les bras en croix, dans une position christique ?
Il y avait une voiture derrière. En fait, dans cette partie de l’Australie, je conduis souvent très, très vite. Mais, pour tourner cette scène, j’étais dans la logique de laisser glisser la moto. Je la laissais glisser sans mettre de puissance. Je freine un peu, ça se voit au feu stop qui s’allume à l’arrière. Et je tenais à rester au milieu de la route pour conduire sur la ligne blanche. C’est comme si on était dans un jeu.
On ressent une impression de légèreté. C’est ce que vous vouliez montrer ?
Oui, c’est intéressant de montrer que cet engin, pourtant lourd, mécanique, peut procurer cette sensation. Dans ce cas, on est comme dans un rêve. Dans le désert, on ressent cette impression de quiétude, il n’y a personne, pas une voiture… Ce n’est pas mon genre de balade habituel, car je suis un homme de circuit.
Vous pratiquez la piste ?
Souvent ! Casey Stoner est l’un de mes héros. Je suis allé au Quatar pour filmer son team. Il allait si vite, c’était un grand moment. Mais il n’y a pas que lui. Je suis fan de Mick Doohan, qui a poussé son corps jusque dans les limites les plus extrêmes.
Présentation de l’exposition Motopoétique au MAC Lyon